Société Loi pour la sécurité intérieure et prostituées : Médecins du monde s’alarme

Bus de la mission prostitution de Médecins du monde © Diane Grimonet

Huit ans après la loi pour la sécurité intérieure (LSI) qui réintroduisait en mars 2003 le délit de racolage passif pour les personnes prostituées, Médecins du monde a rendu publics le 18 mars 2011 les résultats d’une enquête menée auprès de personnes en situation de prostitution rencontrées dans plusieurs villes de France (Nantes, Montpellier, Paris, Rouen, Poitiers). Le constat est sans appel. La LSI n’a eu que des effets néfastes sur leur santé et leur sécurité.

Médecins du monde relève ainsi une série de faits alarmants : la confusion qu’a engendrée cette loi pour les premières concernées dans un pays où la prostitution n’est théoriquement pas interdite ; une importante dégradation du comportement des forces de police (répression, humiliations) quand leur protection serait pourtant une nécessité ; la double peine dont sont victimes les femmes migrantes, souvent sans papiers, les personnes étrangères étant les premières visées par la loi ; une stigmatisation accrue dans la mesure où la loi fait des personnes prostituées des délinquantes et légitime le mépris et l’agressivité à leur endroit ; un accès aux soins rendu plus difficile du fait de lieux de prostitution plus isolés et donc plus dangereux.

Davantage de violences envers les prostituées

Ce n’est pas la première fois que Médecins du monde dénonce cet état de fait. Mais en y introduisant un élément nouveau et d’importance : les violences dont se rendent coupables les clients prostitueurs, encouragés par l’impunité dont ils bénéficient. Insultes, menaces, violences physiques… Ces hommes savent qu’ils ne risquent rien. Forts de leurs billets et d’un « bon droit » jamais interrogé, ils sont de plus en plus nombreux à se montrer violents. La majorité des personnes interrogées ont déclaré avoir déjà subi des agressions sérieuses : tentatives de vol, coups, violences avec armes, etc.

Ce sentiment d’impunité des « clients » n’est certes pas nouveau, pas plus que les violences qu’ils exercent contre les prostituées, comme le montrent de nombreuses enquêtes internationales. Mais la LSI contribue encore à renforcer ce sentiment de pouvoir qui caractérise le prostitueur.

Cette dénonciation de Médecins du monde vient s’ajouter à un dossier déjà lourd puisque les textes internationaux appellent désormais les Etats à décourager la « demande », c’est-à-dire à tirer les conséquences de la responsabilité majeure de ces hommes dans le développement de la traite des femmes. Leur impunité pourra-t-elle durer longtemps ? La question est posée, notamment par la Mission d’information sur la prostitution en France qui devrait rendre prochainement ses travaux. En attendant, un souci minimum d’égalité exigerait la suppression de toute forme de répression contre les personnes prostituées.

Claudine Legardinier – EGALITE

Voir l’enquête de Médecins du monde, enrichie de témoignages, de photos…

Photo en page d’accueil :
Bus de la mission prostitution de Médecins du monde © Diane Grimonet

—-

print