Chroniques Coûts du procès pour DSK : combien d’heures de ménage ?

Alain Piot

Comme beaucoup de gens de mon espèce, c’est-à-dire petits bourgeois, un peu bobos – un peu seulement – je fais appel aux services d’une employée de maison. Hier on disait femme de ménage, avant-hier bonne, encore avant servante… Le statut a évolué, un peu moins vite que le vocabulaire, je pense.
Notons au passage qu’aux Etats-Unis on dit housekeeper.

J’ai été très choqué ces dernières temps, ainsi que ma femme et mes ami(e)s, dans le contexte du séisme de magnitude 9 sur l’échelle du FMI, d’entendre détailler et énumérer les biens du couple DSK, avec une minutie étonnante, à la petite cuillère en vermeil près. On comptabilisait aussi les dépenses dudit couple destinées à faire face aux frais d’un procès menaçant et à s’extirper d’une incarcération jugée planétairement ignominieuse.

Mais bon sang de quoi s’agit-il ? D’un très haut fonctionnaire accusé (présumé innocent) de viol et, en face, d’une très simple housekeeper, victime (présumée) du premier.
Le dernier salaire annuel du Très Haut était, dit-on, de 441 980 $. Il va percevoir une indemnité de départ de 265 188 $ au moins, plus une retraite à vie, s’ajoutant à d’autres retraites (de ministre par exemple).
La Très Basse housekeeper n’a pour revenus, je présume, que son salaire d’employée d’un hôtel de luxe. Je n’en connais pas le montant exact !
Puis il y a les frais : pour le Très Haut, un million de dollars de caution (je laisse de côté le dépôt de garantie), plus les frais de surveillance mis à sa charge : 200 000 $ par mois dit-on. Plus la location d’un appartement : la première location qui a échoué était estimée à 13 600 $ par mois. Etc. etc.

Je me suis demandé : avec tout cet argent gagné et dépensé, en me limitant à un seul mois de frais, combien d’heures de ménage pourrait-on payer à une housekeeper ? Je traduis en euros et dans un contexte français, c’est plus parlant : j’arrive (on peut bien sûr me contredire) à 99 524 heures de ménage (bon prince, je paye 12 € nets), soit 2 211 semaines à plein temps, soit encore plus de 42 ans de travail, congés compris.

J’entends déjà vos critiques : « Mais vous ne comptez pas les charges ! » C’est volontaire.
De l’autre côté, je ne comptabilise pas non plus le montant de la retraite du Très Haut car je ne le connais pas !

Alain Piot, sociologue

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