Société Renforcer la résidence alternée pour prévenir la délinquance ?

Par là... © La Photo libre

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Renforcer la résidence alternée, une bonne idée, quand on sait que le partage de la garde est adopté dans seulement 14% des divorces. Mais la proposition de loi déposée à l’Assemblée nationale le 18 octobre dernier par le député UMP Richard Mallié, est loin d’être nouvelle. Un texte quasiment identique avait déjà été déposé en 2009. Et l’exposé des motifs justifiant le texte 2011 est douteux : exit l’égalité entre femmes et hommes, mères et pères, place à la lutte contre les familles monoparentales génératrices de délinquants.

Deux articles ont été ajoutés à la proposition de loi de 2009 et complètent les articles 372-3 et 227-2 du code civil. Ils établissent clairement le « droit d’entretenir des relations personnelles avec ses deux parents », précisent les modalités légales en cas de déplacement de l’un des adultes, et fixent des sanctions en cas d’entrave de l’un des parents. Rien de très novateur.

En revanche, la lecture de l’exposé des motifs de la proposition de loi de 2011 différencie sensiblement les deux versions. Malgré un très large usage du copier-coller, le doigt du rédacteur a ripé sur la touche effacer au niveau du paragraphe sur l’égalité. La citation du professeur de psychologie Jean Le Camus, « la résidence alternée apparaît la plus égalitaire entre homme-femme, père-mère, et assure une égalité de responsabilités entre les parents », a totalement disparu.

La notion n’était-elle pas un bon argument de vente ? Il semble que non puisqu’à la page 3 de la nouvelle proposition de loi, l’énoncé des dangers de la rupture des liens familiaux avec l’un des parents est accompagné d’une petite phrase fallacieuse : « Les statistiques récentes soulignent que les enfants élevés principalement par un seul parent sont plus enclins à sombrer dans la délinquance que la moyenne. »

Pour le CNRS, pas de liens entre familles monoparentales et délinquance

Pourtant, en 2008, le CNRS a livré les résultats d’une enquête sur la délinquance. La structure familiale n’explique le phénomène délinquant que dans 1 à 3% des cas, autant dire presque jamais. Pour le centre de recherches, « il n’y a quasiment pas de lien entre le comportement délinquant d’un mineur et la structure de sa famille. Par contre, cette dernière aurait une influence sur la sanction judiciaire ».

En France, personne n’ignore que près de 85% des familles monoparentales sont constituées d’une mère qui vit seule avec son ou ses enfants. Les députés à l’origine du texte veulent-ils laisser entendre que les enfants élevés par leur mère seule sont plus enclins à la délinquance ?

Ce motif place d’emblée le père dans un stéréotype d’autorité. Favoriser la garde alternée, c’est mettre les parents divorcés sur un pied d’égalité. Les stéréotypes d’autorité pour les hommes et de maternage laxiste pour les femmes sont faux et ne justifient en rien l’adoption du texte.

Mais après tout, cette idée n’a sans doute pas effleuré l’esprit de Richard Mallié, le député à l’origine de cette proposition, qui est également l’un des quatre-vingt signataires de la lettre demandant à Luc Chatel de retirer la théorie du genre des manuels de SVT.

Louise Gamichon – EGALITE

 

 

 

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