Chroniques Le coup de cœur de la panthère : On en rêvait, Buenos Aires l’a fait !

Rues, avenues, boulevards Victor-Hugo, Jean-Jaurès, Général-de-Gaulle, Jean-Moulin, Pasteur… Sauf le respect que nous vous devons, messieurs, – et ceux-là le méritent – nous habitons, nous travaillons, nous nous promenons dans des rues aux patronymes masculins ; nous y adressons consciencieusement tous nos courriers.

Heureusement, la victoire, la liberté, la résistance permettent à des noms communs féminins de figurer sur des plaques de rues. Mais nos municipalités ne laissent qu’une place mineure à Danielle Casanova, Marie Curie, Louise Michel… Et s’il y avait des centaines de femmes à honorer ? Nous avons beau crier à l’injustice, les habitudes machistes ont la vie dure !

Et pourtant… C’est dans l’hémisphère Sud que j’ai eu, contre toute attente, la plus agréable des surprises…

Buenos Aires, port gigantesque de 16 millions d’habitants sur les bords du fleuve de la Plata, avec des airs de Rome et de Madrid et le gigantisme du continent américain. Et des airs de tango qui vous entraînent…

Rien dans la ville n’annonce la surprise que réserve Puerto Madero, l’ancien quartier des docks, devenu depuis une vingtaine d’années un quartier d’affaires et de rues animées où voisinent multinationales, bars et restaurants branchés.

Originalité de ce quartier : toutes les rues sans exception portent des noms de femmes. Une volonté de la municipalité locale de « réparer l’injustice » faite aux femmes argentines, les oubliées de cette forme de reconnaissance publique. Faiblesse malheureusement transcontinentale.

7-10-07 CIUDAD AUTONOMA DE  DE BUENOS AIRES: SELECTO BARRIO DE PUERTO MADERO, ANTIGUO  PUERTO DE LA CIUDAD. FOTO  MARTIN ACOSTA

Juana Manso, créatrice de l’éducation populaire au XIXe siècle et militante pour les droits des femmes ; Marta Lynch, écrivaine du XXe siècle ; Macacha Guemes, activiste de la Révolution de Mai, en 1810 ; Azucena Maizani, chanteuse et compositrice de tangos ; Azucena Villaflor, l’une des fondatrices de l’association des Mères de la place de Mai…

Promenade réjouissante que l’on fait tête levée, un sourire aux lèvres – un brin incrédule tant cette reconnaissance publique est rare ! – , avec un détour par le superbe parque de las Mujeres Argentinas (parc des Femmes argentines) et une pause pour admirer le majestueux puente de la Mujer (pont de la Femme)…

On en rêvait ? Buenos Aires l’a fait !

Et si nous suggérions l’idée à tous nos édiles chargés de créer de nouveaux quartiers ?

Danielle Michel-Chich

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