Non classé Le wifi en boîtes de conserve

Fatma Elkory Oumrane, présidente de l'association mauritanienne Citoyenneté et nouvelles technologies

Fatma Elkory Oumrane, présidente de l'association mauritanienne Citoyenneté et nouvelles technologies

Fatma Elkory Oumrane, présidente de l’association mauritanienne Citoyenneté et nouvelles technologies (capture d’une vidéo).

Outre le rôle important joué par les femmes, les révolutions récentes dans le monde arabe ont braqué les projecteurs sur l’usage des nouvelles technologies. Rapides et faciles à utiliser, elles ont été une très utile source de mobilisation. Le Forum de l’Awid en a profité pour aider ses participantes à mieux les connaître grâce à l’association APC (Association for Progressive Communications) qui s’y consacre depuis une vingtaine d’années.

Sa responsable pour l’Amérique latine et les Caraïbes, Dafne Sabanes Plou, explique pourquoi : « La technologie a d’abord été un monde d’hommes. Les femmes l’étudient moins et lorsqu’elles le font, elles trouvent moins facilement du travail dans ce domaine. Nous avons donc décidé de mettre l’accent à la fois sur la formation – de l’internet à la vidéo, en passant par la radio – et sur la sensibilisation à ce que ces technologies apportent à la défense des droits des femmes. Le risque étant que, si elles les ignorent, la fracture internet s’ajoute aux autres inégalités qu’elles subissent. »

C’est ainsi que Fatma Elkory Oumrane, documentaliste et présidente de l’association mauritanienne Citoyenneté et nouvelles technologies, raconte qu’elle s’est retrouvée un beau jour sur le toit d’une maison d’Ifrane, au Maroc « avec mon voile, ma casquette, une échelle, un poteau, et des boîtes de conserve ! ».

Le but ? Apprendre à utiliser celles-ci en les fixant sur le poteau pour diffuser l’accès internet à partir d’une source ADSL dans un rayon de plusieurs centaines de mètres alentour et permettre ainsi à de nombreuses personnes de se connecter. Image qui peut prêter à sourire, mais qui symbolise bien l’inventivité dont doivent faire preuve les pays du Sud pour intégrer le monde virtuel contemporain !

Ailleurs, en Egypte, c’est la vidéo qu’utilise Manal Hassan, jeune militante de la campagne Askar Kazeboon (Les militaires sont des menteurs, en arabe). Armée d’un vidéo projecteur, d’un drap blanc et d’un ordinateur, elle s’adresse, dans les rues du Caire mais aussi dans les campagnes, au peuple égyptien souvent analphabète.

« A tous ceux qui n’ont pas accès à une autre information que celle du gouvernement, nous montrons ce qu’ils ne voient pas à la télévision : les femmes déshabillées avec violence sur la place Tahrir et les agressions de l’armée. Nous avons aussi recueilli et mis sur internet plusieurs milliers de témoignages de personnes emprisonnées injustement. Pour nous, les vidéos sont un outil de propagande essentiel dont nous ne pourrions plus nous passer car elles ne sont pas seulement un outil mais un nouveau moyen de vivre ! »

La solidarité et le partage d’expériences étant depuis longtemps un outil précieux du féminisme, l’APC favorise également la mise en ligne sur son site d’histoires individuelles. « Les femmes ont ainsi la possibilité de raconter leur vie aux autres, et c’est une puissante source d’encouragement. » Toutes celles qui n’ont pas pu se rendre à Istanbul pourront ainsi participer un peu aux échanges. Celles, du moins, qui auront accès à internet….

Moïra Sauvage – EGALITE

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