Non classé Du cœur au regard : Hubert Dubois, documentariste engagé

Image du film "Enfants forçats", de Hubert Dubois

Image du film "Enfants forçats", de Hubert Dubois

Image du documentaire Enfants forçats, de Hubert Dubois.

Enfants forçats, le titre claque et invite à réfléchir : le dernier documentaire d’Hubert Dubois est à l’image de son auteur, celle d’un « journaliste-reporter d’image » à l’âme attentive aux malheurs du monde, un homme engagé dans la dénonciation de l’injustice, qui n’hésite pas à se dire, le regard clair et la moustache rieuse, « féministe »

Il réalise en effet depuis plus de vingt ans des films qui ne peuvent laisser indifférent : que ce soit – déjà – sur le travail des enfants dans le monde, avec L’Enfance enchaînée, le trafic entourant l’adoption internationale ou la prostitution, il cherche toujours, explique-t-il, à « aller comprendre ce qu’il y a derrière, accumuler les éléments qui [lui] permettent une réflexion ».

Nul militantisme chez lui, pourtant. La prostitution et la traite, par exemple, il dit « être tombé sur le sujet par hasard », lors du tournage d’un sujet pour TFI au sein de l’agence Capa où il travaillait alors.

« Comme beaucoup d’hommes, je n’avais jamais réfléchi à la prostitution qui me semblait alors être un échange entre adultes consentants, avoue-t-il. Mais ce que j’ai vu, tandis que je cherchais à montrer la coercition et la brutalité de la traite, c’est l’aliénation et la manipulation d’un système qui, comme aux Pays-Bas, entretient les notions de prostitution volontaire ou forcée. Il s’agit bien d’une aliénation et ce sont les larmes d’une ancienne prostituée qui, un jour, m’ont permis de comprendre pourquoi et comment ces femmes sont amenées à se dire, bien malgré elles, volontaires… »

Hubert Dubois a parcouru le monde et démonté bien des mécanismes. De la Colombie à Madagascar en passant par l’Inde, le Nigeria ou la République Dominicaine, son regard aigu fait découvrir le monde tel qu’il est. Et il n’est pas très beau… Les enfants que son dernier film nous fait rencontrer sont, comme au XIXe siècle chez nous, vendus pour travailler dans des ateliers clandestins en Inde, dans des mines où leurs petits doigts font merveille au Burkina, ou dans les champs de poivrons aux Etats-Unis.

Heureusement, des ONG sont là pour dénoncer le phénomène. « Le travail de ces associations est une mine d’information pour un réalisateur, explique Hubert Dubois. Je les écoute d’abord parler de ce qu’ils font, puis j’entre avec eux là où ils vont, et ils me permettent d’aller au-delà du regard extérieur, d’établir une relation de confiance essentielle à mes yeux avec ceux que je vais montrer. C’est énorme ! »

On peut ainsi découvrir dans les Enfants forçats un personnage remarquable, Kailash Satyarthi, président indien de la Global March Against Child Labour (Marche globale contre le travail des enfants), dont l’humanité et l’infatigable volonté percent l’écran.

Hubert Dubois le reconnait, il aime beaucoup travailler avec des femmes : « Peut-être tout simplement parce que je suis un homme ! ». Mais au-delà de la boutade, il y trouve « une autre relation à la société, différente, plus juste à [son] sens. Et [il] ne comprend pas pourquoi certaines féministes refusent aux hommes le droit de se revendiquer de ce terme, car [il est] persuadé que rien n’avancera si les hommes ne le deviennent pas ! »

Moïra Sauvage – EGALITE

Enfants forçats, documentaire d’Hubert Dubois, Arte, mardi 29 mai, 20h35. A revoir sur Arte +7 et Arte VOD.

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