Non classé Yue Yang rêve de transformer les villes chinoises après ses études d’ingénieure

Yue Yang

Yue Yang

Yue Yang a 23 ans. Si cette jeune Chinoise a choisi de faire ses études d’ingénieure à l’Insa de Rennes (*), c’est parce que sa ville natale, Jinan, est jumelée avec la capitale bretonne. En 4e année de génie civil et urbain, Yue fait partie des 21% d’étudiants étrangers sur les 1 700 que compte l’Insa, et illustre la volonté affichée de l’école de promouvoir l’égalité des chances et notamment de favoriser l’accès des filles au métier d’ingénieur.

Dans chaque promotion de l’Insa, 25% des étudiants sont des filles. Une minorité que Yue apprécie. « On n’est pas nombreuses donc on s’entend bien, dit-elle de sa voix douce où pointe à peine un accent. On a plus de chances de communiquer avec les garçons, d’échanger des idées. En Chine, les étudiants ont plus de pression qu’en France. Il y a beaucoup de concours et d’examens et plus de sélection pour l’entrée en faculté. Comme nous sommes plus nombreux, nous sommes plus stressés à l’idée de ne pas avoir un bon job.»

En Chine, les filles sont devenues précieuses

Fille unique, bien sûr, Yue pense souvent à ses parents qu’elle retourne visiter une fois par an pendant les vacances d’été. « Ils ont toujours voulu que je parte. Dans notre petite ville, j’étudiais à l’université mais j’avais moins de chances d’apprendre qu’ici. Pourtant, ils n’aimeraient pas que je ne revienne pas. »

Du coup, la jeune fille est en train de repenser son avenir. « Après l’Insa, je pense faire une thèse et je n’ai pas encore choisi ma destination peut-être en France ou ailleurs en Europe car j’aime beaucoup voyager », disait Yue en début d’entretien. Puis parlant de ses parents si loin, au nord de la Chine, elle se ravise : « Après mes études, finalement, je vais peut-être rentrer en Chine pour travailler et m’occuper de mes parents. »

Bien sûr, elle sait qu’elle leur manque, mais elle se rassure : « Pour l’instant, ça va parce qu’ils ne sont pas encore en retraite et ils ont beaucoup de travail. » Un père professeur de littérature à l’université, une mère neurologue, Yue fait partie de la classe chinoise favorisée.

Si, pour la jeune Chinoise, l’égalité des femmes et des hommes, n’est pas vraiment un problème en Chine, c’est parce qu’elle pense spontanément au domaine professionnel. « Mon parcours n’est pas exceptionnel, dit-elle. En Chine, les femmes et les hommes sont égaux. Toutes les femmes travaillent sinon elles sont mal vues dans la société. Dans les villes, l’égalité existe dans l’éducation mais je pense que les filles ont moins de chance à la campagne, parce que les parents préfèrent les garçons. Quand j’étais petite, je connaissais des petites filles qui n’allaient pas à l’école et qui se mariaient très jeunes. C’est en train de changer ; presque toutes les filles vont à l’école parce que maintenant en Chine, il y a plus de garçons que de filles alors elles sont devenues précieuses ! »

Pourtant, lorsque l’on aborde le domaine privé, Yue reconnaît : « En Chine, les femmes s’occupent de la maison, des enfants, des parents quand ils sont vieux et malades, et de leur mari. Il n’y a pas de partage des tâches ménagères. » Une situation qui pourrait changer selon la jeune fille car « les femmes en Chine sont en train de se révolter pour avoir plus de droits. Elles disent aux hommes : c’est aussi votre maison, c’est aussi votre enfant ! »

«Je croyais qu’en France les hommes et les femmes avaient toujours été égaux»

En décembre dernier, avec l’Insa, Yue a participé à la Biennale de l’égalité organisée par la région Bretagne. « J’ai été étonnée, je croyais qu’en France, les hommes et les femmes avaient toujours été égaux. J’ai appris que les femmes ont obtenu le droit de voter ou de ne pas obéir à leur mari voilà moins de cent ans ! Je suis impressionnée par tout ce que les Françaises ont fait pour acquérir tous ces droits ! »

Aujourd’hui, Yue ne voit pas d’un très bon œil les débuts de l’occidentalisation de la Chine : « Mon pays est en train de perdre ses traditions, sa culture. Depuis vingt ans, dans toutes les grandes villes chinoises, on ne voit plus que des grands bâtiments ; on détruit tout pour construire du moderne. Je préférerais que la Chine puisse progresser en gardant sa culture. »

Un constat qui n’est sans doute pas étranger au choix de son futur métier. Quand elle retournera travailler en Chine, grâce à sa spécialisation en génie civil, Yue fera partie de celles et ceux qui construiront les villes chinoises. « Ça m’intéresse beaucoup, dit la jeune fille. Je pense qu’il y a une méthode pour harmoniser les choses, pour se développer et garder ses traditions en même temps. »

Geneviève Roy – EGALITE

(*) Institut national des sciences appliquées, école publique d’ingénieur-e-s.

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