Société Sauver les femmes victimes de violences conjugales

© Alain Bachellier — Flickr-.

Chaque année, la Fédération nationale Solidarité Femmes (FNSF) accompagne des femmes en très grand danger : un processus qui les aide à sortir de la victimisation et du cercle infernal de la violence conjugale quotidienne.

« Depuis 1987, cet important réseau féministe (68 associations en France), a développé des méthodes et des compétences spécifiques indispensables au traitement des violences faites aux femmes. Elles sont mises en œuvre dans l’écoute et l’orientation au 3919, et dans l’hébergement de celles qui doivent quitter le domicile conjugal (6300 femmes et enfants hébergés en 2011) », précise la Fédération.

Ce dispositif que la FNSF a développé permet de mettre en sécurité des femmes avec ou sans enfants. L’évaluation et l’analyse des situations apportent une réponse rapide pour les victimes, basée sur l’éloignement géographique dans « des lieux dédiés et sécurisés » au sein du réseau associatif de la FNSF.

  • Madame C a été victime de violences conjugales pendant 10 ans avec de nombreux certificats médicaux mentionnant des ITT, elle a décidé de quitter son mari après que celui-ci ait frappé leur fille de 4 ans handicapée. Madame C n’a aucune solution d’hébergement, cela fait 6 mois qu’elle passe de foyer en CHRS en faisant appel au 115 quasiment toutes les semaines. Les services d’urgence ont épuisé toutes les possibilités d’hébergement et ne peuvent plus intervenir. Madame C a obtenu un logement mais l’appartement était à un ami de monsieur C, et madame C n’a aucune famille dans la région.                                       Témoignage recueilli par la FNSF

Lors de la matinée d’étude organisée au Sénat par Solidarité Femmes le 10 octobre dernier, la question des féminicides était au cœur des discussions. En effet, les agressions subies par les femmes qui demandent une « mise en sécurité sont d’une extrême violence avec un haut risque de létalité ». Elles sont, très souvent, anciennes et persistantes, en moyenne 6 ans, et, 85% ont déjà signalé leur situation à la police, à la gendarmerie ou aux services de santé.

Une violence extrême souvent intrafamiliale

Les dispositifs d’hébergement mis en place par la FNSF répondent à un sentiment alarmant d’insécurité. Par manque de place, les associations sont obligées de faire un choix et de ne traiter que les cas les plus urgents. De manière générale, ces violences – morales et/ou physiques – sont d’une gravité extrême. Deux tiers des femmes concernées par les violences de leur conjoint sont victimes de menaces de mort, et un quart de ces femmes ont fait l’objet de tentatives de meurtre.

Le deuxième objectif après la mise en sécurité des femmes est celle de leurs enfants. Une mission primordiale quand on observe les chiffres : 94% des enfants concernés sont témoins de ces maltraitances, 63% en sont victimes. Ces violences, morales et physiques, sont souvent graves. Ainsi, 29% sont sujets à des sévices physiques graves ; plus de la moitié d’entre eux avaient moins de 6 ans au moment des faits. La FNSF met un point d’honneur à leur prise en charge : 204 femmes et 300 enfants ont été relogés en 2011.

  • Madame E est arrivée en France il y a peu, monsieur F (son concubin) ayant eu du mal à trouver un passeur pour la faire venir. Elle a demandé un statut de réfugiée politique dès son arrivée, celui-ci lui a été refusé ce qui a rendu monsieur encore plus violent. Pour Monsieur F, cela n’avait servi a rien de la faire venir car elle n’était même pas capable d’accéder à ce statut que lui-même avait eu facilement. Les violences ont empiré et madame E a fui le domicile avec ses 3 plus jeunes enfants, les aînés étant déjà confiés à des amis. Elle se retrouve ainsi désemparée dans un pays qu’elle ne connaît pas et parlant une langue qu’elle ne maîtrise pas.                                                                      Témoignage recueilli par la FNSF

La précarité : un facteur aggravant

La précarité et les moyens économiques sont bien souvent des freins au départ de ces femmes. En effet, la FNSF précise que 83% des femmes mises en sécurité n’ont pas d’activité professionnelle. « C’est l’un des éléments du contrôle mis en place par l’auteur des violences. Privation des biens de salaire, de toute prestation, interdiction de travailler, dépossèdent la femme de toutes ses ressources économiques et entraînent précarité et impossibilité de partir ».

  • Madame B vit en France depuis 2 ans avec ses 2 enfants et son mari. Monsieur B est très violent et leur fils commence à adopter la même attitude, autant avec sa mère qu’avec sa soeur. Victime également de violences psychologiques et économiques, madame B est surveillée par l’ensemble de la famille de monsieur B, qui habite dans le même quartier. Madame B n’a pas le droit de sortir seule et c’est pendant ses cours de français dans une association du quartier qu’elle a réussi à entrer en contact avec une association de la Fédération. Madame B n’a pas accès au compte bancaire, monsieur B fait les courses avec elle et c’est lui qui paye. Madame B a juste un peu de liquide pour acheter du pain. Madame B a ouvert un compte à son nom afin d’y percevoir les prestations sociales mais monsieur B lui prend tout dès le versement. Monsieur B a obtenu de nombreux crédits à leurs deux  noms et explique que sa femme ne peut pas le quitter sinon, elle devra tout rembourser toute seule.                                                Témoignage recueilli par la FNSF

Faire reculer le sexisme pour faire reculer les violences

Bien au-delà du conflit d’ordre personnel, les violences faites aux femmes relèvent d’un véritable problème de société.

« On ne pourra les faire reculer que si l’on comprend que ces violences sont aussi l’une des conséquences tragiques d’une société où perdurent les comportements sexistes au quotidien. Faire reculer le sexisme et faire reculer les violences est un même combat », explique Najat  Vallaud-Belkacem, ministre des Droits des femmes.

Deux études émanant de l’INSEE et de l’Observatoire National de la Délinquance et des Réponses Pénales publiées fin octobre font état de ce sexisme profondément ancré dans la société française : injures (une femme sur sept), gestes déplacés ou menaces (une femme sur vingt) …

Ces deux dernières années, une femme sur trois s’est déclarée victime de violences ; plus de 400 000 femmes sont concernées par les violences conjugales. Si ces dernières sont observables quel que soit le milieu social, les plus touchées sont les femmes les jeunes, les femmes les plus fragiles, ou en situation de précarité.

Le ministère des Droits des femmes est déterminé à « adopter une série de mesures de lutte contre les violences sexistes ». Cette volonté ministérielle est confirmée par : un comité interministériel aux droits des femmes prévu pour fin novembre, et la création prochaine d’un Observatoire national consacré aux violences faites aux femmes.

 

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