Articles récents \ France \ Société Sarah Ourahmoune : "la boxe rythme ma vie, mon sommeil, mes journées, mon alimentation, mon planning"

Sarah Ourahmoune a été huit fois championne de France, trois fois championne de l’Union Européenne, vice-championne d’Europe en 2011 et championne du monde en 2008.  Première femme à prendre une licence compétition en France, elle se prépare actuellement en vue d’une qualification pour les JO de 2016.

Elle est directrice de l’entreprise Boxer&Inside et chargée de projet au sein du club Boxing Beats d’Aubervilliers.

Héritière du pugilat antique, les règles de la boxe anglaise moderne furent édictées par la Marquis de Queensberry en 1865. Ce sport fut androcentré et constitutif d’une masculinité virile pendant plus de 150 années. Au milieu des années 90, les femmes ont perforé l’espace homosexué de la salle de boxe. Il aura fallu attendre 2012 pour que les boxeuses soient autorisées à participer aux Jeux Olympiques.
Vous avez été la première compétitrice en France, comment êtes-vous arrivée à la boxe, et quelle représentation aviez-vous de ce sport à travers les films ?
Pour ma part, quand j’ai commencé la boxe, il n’y avait pas  de film sur la boxe féminine. Je me représentais la boxe à travers Rocky. Puis, j’ai rencontré Saïd Bennajem, entraîneur à Aubervilliers qui m’a expliqué que la boxe ce n’était pas ça, que c’était toucher sans se faire toucher. Le film Girlfight est sorti en 2001 et a donné à voir une image dénaturée de ce sport puisque c’est une femme qui se bat contre son compagnon et Million Dollar Baby par la suite a participé à démocratiser ce sport.
Comment est-ce vous percevez le monde de la boxe et qu’est-ce que ce sport représente pour vous ?
C’est mitigé, le monde la boxe est problématique parce que nous avons affaire à une Fédération qui ne fonctionne pas très bien. Il y a des problèmes de budgets et de gestion ce qui  peut jouer sur nos performances sportives. En boxe loisir, ou boxe éducative, on n’est pas confronté à ce genre de problème. En ce qui concerne la boxe professionnelle, c’est un monde que je connais peu, mais de ce que j’en entends, c’est encore très peu développé en France. Il y a des titres qui ne valent pas grand-chose parce qu’on fait se rencontrer des boxeuses de niveaux différents notamment pour les championnats d’Europe ce qui dénature un peu la boxe.
La boxe rythme ma vie, mon sommeil, mes journées, mon alimentation, mon planning. C’est aussi une ligne de conduite. Ça a peut-être aujourd’hui trop d’importance, il y a des moments où je le regrette. A côté de ça, la boxe m’a apporté tellement en termes de confiance en moi, et elle m’a permis de m’exprimer, d’être moins introvertie. Il y a des jours où je remercie la boxe pour tout ce qu’elle m’a apportée et d’autres où c’est difficile. C’est un rythme de vie que j’ai imposé à ma famille, à mon mari et à ma fille . Mais j’ai quand même de la fierté par rapport à tout ce que j’ai accompli.
 
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Que pensez-vous des stratégies marketing des équipementiers qui développent des gammes de gants roses à destination des femmes ?
Avec toutes les disciplines qui se développent notamment les disciplines fitness, le yoga boxing, le fit-boxing et l’aréoboxe, il y a un marché. Même si pour ma part, je ne suis pas fan des gants roses, il semble que les femmes aient besoin d’affirmer leur féminité dans ce monde connoté « masculin ».  Elles réclament des gants roses, des bandes roses, des casques etc… . Mon sponsor m’avait fait mettre des gants roses à une époque, de nombreuse femmes avaient alors commandé la paire, c’est efficace.
Que pensez-vous de l’ouverture des JO aux femmes, est-ce qu’il y a eu un changement de représentation de la boxe féminine ?
Nous les boxeuses, nous sommes contentes de l’ouverture de la boxe féminine aux JO pour les femmes, même si il n’y a que trois catégories de poids. C’est un combat que l’on mène depuis des années. Néanmoins en France, ça n’a pas eu beaucoup d’impact et ça n’a pas été médiatisé, peut-être parce qu’aucune Française ne s’est qualifiée. En Angleterre ça a vraiment participé à développer la boxe féminine. Avec Nicola Adams qui est devenue championne Olympique, elles ont désormais des équipes complètes.
En France Million Dollar Baby a eu plus d’impact sur le développement de la boxe féminine que l’ouverture des JO aux femmes.
 
Natacha Lapeyroux 50-50 

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