Articles récents \ France \ Société Bréviaire droits des femmes pour les journalistes : c’est quand le changement ?

Depuis toujours, on lit «8 mars, journée de la femme» dans les médias. Depuis toujours, on entend «crime passionnel» pour meurtre machiste, dans les médias. Des associations féministes ont rédigé un bréviaire à leur attention. Les entendront-ils enfin ?

Les journalistes qu’ils soient femmes ou hommes ne lisent donc pas les communiqués de presse des associations féministes ? N’ont-ils pas lu le manifeste de Prenons la Une, collectif de femmes journalistes pour une juste représentation des femmes dans les médias et l’égalité professionnelle dans les rédactions, signé par 700 journalistes, politiques, chercheur-e-s, féministes, enseignant-e-s, citoyen-ne-s etc.. ?

Manifestement elles-ils ne savent pas n’ont plus que le baromètre du 6 février 2015 réalisé par le CSA sur la présence des femmes dans les programmes d’informations de 16 chaînes hertziennes gratuites et Canal+ montre clairement que leur présence a régressé (lire l’article de 50-50 magazine) Pourtant, récemment 4 grands quotidiens (1) ont été analysés du 2 au 6 février 2015. Le résultat est consternant : 85,8 % d’hommes font les Unes, 81,42 % d’hommes sont sur les photos, 78,5% des personnes citées sont des hommes, 87 % des éditos et chroniques sont signés par des hommes !

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Plusieurs associations : la CLEF, Femmes Solidaires, Chiennes de garde, Libres Mariannes, Osez le féminisme ! ont rédigé une bréviaire à l’attention des médias. Seront-elles entendues ?

« 1/ 8 mars : Journée internationale DES DROITS DES femmes au lieu de journée internationale de la femme.

La Femme est un concept, un fantasme « idéal », bien loin des réalités des femmes dans la vie quotidienne. Le 8 mars est un moment important pour faire le point sur les avancées pour les droits des femmes.

2/ Droits humains au lieu de droits de l’Homme.

Cette terminologie date de la Révolution française qui a exclu volontairement les femmes de la citoyenneté. Seuls les pays francophones parlent de droits de l’Homme, tous les autres pays du monde évoquent les droits humains. Au nom de quoi l’Homme même avec un grand H (que l’on n’entend pas, même si on le lit) engloberait toutes les femmes?

3/ User du féminin pour les noms de métiers, les grades, les titres et les fonctions occupés/portés par des femmes : artisane, compositrice, etc… les noms de métiers, grades, titres et fonctions existent dans la langue française, il faut les utiliser quand on parle d’une femme (cf. Non, le masculin ne l’emporte pas sur le féminin d’Eliane Viennot aux éditions iXe (2014).

À l’inverse, user du neutre lorsqu’il s’agit de stéréotypes féminins «4h30, à l’école, c’est l’heure des mamans parents. »

4/ Gestion raisonnable au lieu de gestion en bon père de famille.

Notion dépassée du droit français qui a disparu le 21 janvier 2015 du droit français.

5/ Violence contre les femmes au lieu de violences à l’égard des femmes.

Contre = opposition à quelqu’un = à l’encontre de

À l’égard de = avoir de la considération pour quelqu’un = respect, attention, etc…

6/ Viols au lieu d’agressions sexuelles / Elle a été violée, il a violé une femme, au lieu de elle s’est fait violer.

Les viols sont des crimes, les agressions sexuelles des délits : parler d’agression est une minimisation. Par ailleurs les victimes subissent. Elles ne sont pas actrices du viol, elles ne l’ont pas « cherché ». (Cf. la différence entre « se faire tatouer » et « être tatouée » ou « il a tatoué »).

7/ Agression sexuelleagresser sexuellement au lieu de abus, abuser.

8/ Mutilations sexuelles féminines au lieu de mutilations génitales féminines

Cette expression ne prenant pas en compte la sexualité des femmes comme droit fondamental mais reléguant les femmes à leur fonction physiologique de procréation.

9/ Féminicide au lieu de meurtre d’une femme

Meurtre d’une femme en raison de son sexe (ex : une joggeuse violée puis tuée par un inconnu). Plusieurs pays d’Amérique latine et d’Europe (Chili, Costa Rica, Colombie, Salvador, Guatemala, Mexique, Pérou, Italie et Espagne) font ainsi du machisme la circonstance aggravante du meurtre, comme cela existe pour le racisme ou l’antisémitisme.

10/ Meurtre (machiste) au lieu de crime passionnel ou drame intra-familial.

Ces crimes – également des féminicides – souvent motivés par la jalousie inhérente au machisme, montrent une situation dans laquelle l’homme considère que la femme – et parfois les enfants – est son objet, et non un sujet autonome. Parler de crime «passionnel» revient à penser «il l’aimait trop». Or la violence –et encore moins le meurtre- n’est jamais une preuve d’amour.»

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Alors, ne serait-il pas temps que les écoles de journalisme créent des modules de formation sur l’égalité femmes/hommes ?

Rappelons que l’article 16 bis de la loi du 4 aout 2014 sur l’égalité femmes/hommes avait prévu une mesure faisant obligation aux établissements d’enseignement supérieur de journalisme « d’un enseignement sur l’égalité entre les femmes et les hommes» mais que la conférence des écoles de journalisme s’était fortement élevée contre cette proposition de l’ancienne ministre des Droits des femmes, Najat Vallaud-Belkacem.

50-50 magazine

1 , Le Parisien, Le Figaro, Libération et Le Monde 

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