Articles récents \ Chroniques Chronique de Félicité : Je hais les mômes

J’avoue, de mon plein gré: je hais les mômes. Je sais, c’est un méga tabou, je sens qu’il y a un certain nombre de gens qui vont me tomber sur le râble et que je vais me faire des ennemis, tanpis j’assume.

Je parle des 3/4/5 ans, les ados c’est pas mon rayon et c’est une autre paire de manche.

Un week-end, j’ai pris en charge la fille d’une copine, dans un élan insensé de magnanimité: eh bien, je vous le dis, pour moi c’était pire que le marathon de New-York, physiquement et psychiquement parlant.

D’abord les gosses ils ont toujours un doudou qu’ils passent leur temps à égarer ce qui provoque de cris de désespoir déchirants et on perd des plombes à le chercher. Ensuite la bouffe: quoique vous fassiez ça va jamais, y zaiment pas. Ah si les yaourts ça marche bien ! Je donne donc à Tina un yaourt parfum fraise, ça lui plait pas. Alors je propose abricot, elle l’ouvre et le renverse sur son pull en signe de protestation. J’ose rien dire, mais je lui foutrais bien une fessée.

Bon, allons donc prendre le train pour aller à Paris, trente cinq minutes de voyage. Je sais pas si vous avez remarqué, les mômes ils pleurent toujours dans le train, je ne sais pas pourquoi peut-être ont-ils faim et soif. J’avais pas été prévenue de cet aspect du problème, je n’ai donc rien à lui proposer. D’ailleurs, elle-même ne sait pas vraiment, elle pigne.

A côté un autre nain (comme un de mes copains les appelle …) se met à pousser des cris stridents. La mère ne dit rien: cela dure un quart d’heure facile. Je suis plutôt de nature pacifiste, mais je vous jure que là franchement, je lui filerai bien un petit gnon sur le citron pour le faire taire. Mais au moins,ça a le mérite de clouer le bec à la petite peste qui est sous ma responsabilité.

Bon on va aller prendre le bus. Tiens, c’est l’occasion de vous avouer que je hais les poussettes (et par conséquent ce qu’il y a dedans). Les femmes conquérantes qui montent dans le bus en vous bousculant avec cet air triomphant de mères sûres de leurs droits et fières de leur progéniture  me gonflent. Déséquilibrée, Tina perd son doudou, on se retrouve à quatre pattes à le chercher en essayant de rester en vie. Ouf, il était tombé sous les roues de cette maudite poussette. Je me demande pourquoi les femmes ne portent pas leur enfant dans le dos comme les mères africaines, ça prend moins de place et et ça fait des enfants plus éveillés. De surcroît, ils ne sont pas à la hauteur des émanations de CO2.

Bref, je continue. On va au cinéma. En plein milieu du film, Tina a envie de faire pipi ; on retraverse donc toute la salle en tâtonnant (heureusement j’ai pris soin de mettre le doudou dan mon sac pour ne pas risquer d’incident). J’ai bien fait car elle en a marre du film, qui moi me passionnait. C‘était le livre de la jungle.

On passe par le stade glace, obligatoire et puis on va au square. Ouf, quelques minutes de tranquillité. Mais la dame assise à mes cotés sur un banc a envie de parler : «elle est mignonne votre fille.» «C’est pas ma fille.» «Ah bon, pardon. Vous n’avez pas d’enfant ?» me questionne t- elle d’un ton compatissant. «NON, j’en ai pas et j’en ai jamais voulu.» La discussion s’arrête là, je sens qu’on n’est plus dans le même camp.

Retour à la maison. Dans le train, je choisis un wagon sans enfant. Puis c’est le diner, purée jambon, ouf ça passe. Je suis épuisée. Mais pas Tina. J’avais oublié qu’il faut lire des histoires aux enfants pour qu’ils s‘endorment. Et sa maman, pressée de partir a omis de me donner ses livres préférés, donc rebelote, re-pleurs, re-cris. Alors je me creuse le chou pour lui inventer une histoire. A la fin, Tina me regarde d’un air méprisant «ton histoire elle est nulle» déclare t-elle.

J’en ai marre, je vais me coucher, qu’elle pleure tant qu’elle veut.

Le lendemain, même scénario, alors je vous passe les détails.
Ma copine, qui a passé son week-end à dormir, vient, fraîche et reposée, chercher sa mouflette en me remerciant. Pendant que nous discutons, Tina en profite pour aller dans le jardin, où j’ai fait un joli petit potager avec soins, temps et amour. Je la vois soudain en train de massacrer allégrement mes salades. Je l’attrape, il est vrai un peu rudement. La mère s’exclame: 
«t’es folle, tu viens de traumatiser ma fille; il fallait lui expliquer ce qu’est une salade, un être vivant, blabla, blabla …» Ça y est, je sens qu’on va plus être copines.

Ce jour-là, j’ai même pensé un moment à apposer sur mon portail  une plaque « interdit aux enfants», mais là je crois que j’aurai été carrément mise au ban de la société.

Il y a pourtant des solutions: par exemple pour les hommes, il y a la vasectomie, une méthode très peu utilisée en France. C’est cool, comme proposition , non?

Sur ces bonnes paroles, je vais me coucher, je ne suis pas encore remise de mon week-end avec cette chipie de Tina.

Emmanuelle Barbaras 50-50 magazine

print