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Longtemps tus, près de 80% des touchers vaginaux et rectaux effectués sur des patients endormis au bloc opératoire auraient lieu sans demande d’autorisation au préalable, selon le rapport des doyens des facultés de médecine rendu la semaine dernière. Une remise en cause de la dignité du patient sur laquelle s’est penché le gouvernement.

Les doyen-ne-s des facultés de médecine ont remis leur rapport la semaine dernière. Verdict : dans 67 à 80% des cas, l’accord des patient-e-s lors de touchers vaginaux ou rectaux à des fins de formation, n’est pas demandé. Légalement, ceci porte un nom : le viol. La loi précise bien en effet que «tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui par violence, contrainte, menace ou surprise est reconnu.»

La polémique est née en janvier dernier lorsque le CHU de Lyon a posté sur son site un document concernant l’apprentissage des étudiant-e-s au cours de leurs stages d’externat. Le document disait : « En service de gynécologie, les futurs médecins doivent apprendre à effectuer des touchers vaginaux […] au bloc opératoire, sur patiente endormie. » La toile s’est enflammée, Twitter en a été témoin. Des patient-e-s ont fait entendre leur voix et leur droit à disposer de leur corps même sous anesthésie, contre une partie du corps médical défendant une pratique qui « part d’un bon sentiment« , comme l’assurait Carole Burillon  la doyenne de l’Université de médecine de Lyon, contactée à cette période par le site Pourquoidocteur.

Le respect des droits des patient-e-s

Marisol Touraine a proposé des mesures dans le but de lutter contre ces pratiques de violation des droits. Le but : que les avancées scientifiques ne s’effectuent pas au détriment de la dignité des patient-e-s. Elle prévoit ainsi la poursuite de l’enquête en cas de plainte, l’envoi d’une instruction aux directrices/directeurs d’établissements de santé leur rappelant la loi, et le développement de l’apprentissage par simulation, avec l’objectif concret d’équiper tous les CHU en simulateur (1) d’ici fin 2017. Cela afin d’assurer un meilleur respect des droits des patient-e-s.

Les initiatrices/initiateurs de la pétition intitulée « Touchers Vaginaux sans consentement! Vous pouvez nous aider! » se sont félicité-e-s de ces avancées gouvernementales et appellent, à présent, les organisations professionnelles elles-mêmes à « prendre leurs responsabilités et à se mobiliser concrètement à leur tour en faveur d’une médecine respectueuse de la loi et bien traitante, prenant en compte la vulnérabilité toute particulière des patient-e-s touché-e-s dans leur intimité« . Avant d’ajouter : « Nous ne sommes pas opposé-e-s à ce que les étudiant-e-s se forment sur nous, nous exigeons simplement le respect de nos droits à savoir que notre consentement soit recueilli, et que nous puissions le retirer à tout moment librement. »

Osez le Féminisme ! rappelle également la nécessité d’éradiquer les violences machistes au sens large dans le milieu médical, qu’il s’agisse du sexisme pendant les études ou de pratiques dégradantes dans le milieu professionnel.

Danièle Gaudry, gynécologue, militante du Planning Familial commente ces mesures gouvernementales: « Sortir la sphère gynécologique d’une sacralisation avec la peur de l’examen gynécologique est également un travail à faire. Un acte médical n’est pas un acte sexuel de domination et ne doit jamais l’être. Bien différencier les deux permet de travailler sur la « bonne » posture professionnelle qui est empreinte d’empathie, d’écoute, de respect de la liberté des personnes mais qui s’adresse forcement à l’intime. Le viol est effectivement une pénétration par quoi que ce soit dans tout orifice, pas uniquement vaginal ou rectal mais buccal également. L’examen des seins par palpation peut être également vécu comme une atteinte corporelle s’il n’est pas expliqué et consenti. Enfin, le rôle des simulateurs dans l’enseignement est important mais ne remplacera pas la vraie vie justement parce qu’il ne s’agit pas d’une personne avec consentement mais de programmes informatiques dans une machine pour les plus performants. »

Lucie Faguais 50-50 magazine

 

1 Un simulateur est un dispositif technique permettant de reproduire de façon virtuelle une situation ou dans ce cas un corps humain destiné à la formation des médecins.

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