DOSSIERS \ Trump président: les droits des femmes en danger \ Monde Quand la bataille contre le racisme d’Elisabeth Warren rencontre le sexisme

Entre les signatures de décrets, les déclarations et tweets absurdes et les confirmations au Sénat des improbables nominé-e-s aux postes de ministres et secrétaires d’état de l’administration Trump, il est difficile d’oublier que le domaine de l’absurde racisme et sexisme a pris le pouvoir aux États-Unis. L’exemple de la sénatrice démocrate Elisabeth Warren, qui s’est faite interdire de parole jusqu’à la fin de la session de confirmation de la nomination du ministre Jeff Sessions, le confirme.

Chaque membre du cabinet de Trump appartient au monde des milliardaires et aux lobbies les plus anti-gouvernement des Etats Unis. Il est souvent rappelé dans les médias, surtout étrangers, que le système démocratique américain va jouer son rôle et empêcher les nominations les plus extrêmes.

Malheureusement ce n’est pas si simple : ainsi, la ministre de l’éducation Betsy Devos, milliardaire opposée aux dotations pour les écoles publiques qu’elle verrait bien redirigées vers les écoles privées et religieuses, a été confirmée par le sénat. Betsy Devos et son mari ont fondé une entreprise de recouvrement pour les crédits véreux mis en place pour que les étudiant-e-s puissent faire face aux coûts de l’enseignement supérieur scandaleusement élevés.

Rappelons aussi que le frère de Betsy Devos est le fondateur de l’entreprise mercenaire Black Waters qui s’était illustrée par ses exactions en Iraq.

Confirmé aussi : Scott Pruitt, comme directeur du Environmental Protection Agency (EPA), l’équivalent du ministre de l’Environnement. Pruitt est un avocat très connecté avec les industries des énergies pas du tout renouvelables. Il a juré la destruction de ce ministère et ambitionne qui plus est de contrôler le travail de la science sur le climat, mesure qui est en train de se mettre en place.

La semaine dernière, c’était le tour de Jeff Sessions d’être confirmé comme ministre de la Justice (attorney General). Jeff Sessions est un ultraconservateur, sénateur d’Alabama, ouvertement raciste, anti-avortement, anti-immigrant-e-s, climato-sceptique, et qui soutient les lois donnant tous les pouvoirs à la police, y compris l’utilisation de la privation des droits civils.

 

La détermination des femmes à lutter contre le racisme et le sexisme

La sénatrice démocrate du Massachussetts Elizabeth Warren, une des voix féministes du Sénat, était bien sûr fondamentalement opposée à la nomination de Jeff Sessions.

Elle a commencé son discours contre cette nomination en lisant la lettre que Coretta Scott King, la veuve de Martin Luther King, avait écrit pour s’opposer à la nomination de Jeff Sessions comme juge fédéral d’un district d’Alabama en 1986. Il s’opposait alors à la garantie de vote des Afro-Américain-e-s. Elizabeth Warren a été très rapidement interrompue par le Sénateur Républicain Steve Daines qui a invoqué la règle 19 (rule 19), interdisant à un-e  sénatrice/sénateur de s’en prendre à un-e de ses collègues. Cette règle n’est jamais utilisée mais remarquable pour faire taire. Elizabeth Warren protesta et obtint de finir de lire la lettre qui rendait claire l’hostilité de Jeff Sessions aux lois garantissant les droits des Afro-Américain-e-s.

Finalement, la sénatrice fut de nouveau interrompue, cette fois par le leader de la majorité républicaine, le Sénateur Mitch McConnell qui demanda à ce que la règle 19 soit appliquée strictement en prétextant « She was warned. She was given an explanation.  Nevertheless, she persisted» (« elle a été prévenue, on lui a donné une explication, néanmoins, elle a persisté »). Ceci lui interdit maintenant la prise de parole jusqu’à la fin de la session.

 

K Harris

Kamala Harris, sénatrice démocrate

La réaction a été immédiate et l’hashtag #NeverthelessShePersisted a immédiatement circulé, rassemblant de nouveau les femmes derrière la défense de leur parole à l’image d’Elizabeth Warren ou Coretta Scott King. La sénatrice de Californie nouvellement élue, Kamala Harris, a immédiatement envoyé un tweet de soutien : « en voulant faire taire Elizabeth Warren le GOP (les Républicains) a donné aux femmes du monde un cri de ralliement #ShePersisted, #LetLizSpeak. »

Le sénateur Jeff Sessions a été confirmé ministre de la Justice, mais les femmes ont une fois de plus montré leur détermination à lutter contre le racisme et le sexisme.

Il faudra braver l’administration Trump décret après décret, loi après loi, pour défendre les droits à l’éducation publique, l’environnement, les droits des femmes, des minorités.

Brigitte Marti 50-50 magazine

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