DOSSIERS \ Trump président: les droits des femmes en danger \ Monde La protection de Mother Earth, la dernière guerre des premières nations américaines

Le 24 janvier, le président Trump signe des mémorandum (autre forme de décret présidentiel) relançant le projet de construction de deux oléoducs, le Dakota Access Pipeline DAPL et le Keystone XL. L’activiste amérindienne Winona Laduke de la réserve de White Earth (Minnesota) déclare le lendemain qu’il s’agit là non seulement d’une déclaration de guerre contre les nations indiennes, mais aussi contre toute personne qui veut boire de l’eau potable.

Depuis le début des travaux de l’oléoduc DAPL , les nations indiennes résistent, forment des camps, se rassemblent. Les femmes sioux de la réserve de Standing Rock du Dakota du Nord ont mené les premiers actes de résistance contre la construction du Dakota Access Pipeline #DAPL avec succès. Cet oléoduc privé, de 3.8 milliards de dollars, piloté par Energy Transfer Partners (ETP), société texane, devait transporter près de 570 000 barils de pétrole par jour du site d’exploitation de Bakken dans le Dakota du nord au Dakota du sud, l’Iowa, et l’Illinois. Son tracé passe sous la rivière Missouri menaçant de contaminer les sources d’eau potable de la réserve indienne et méprisant les terres sacrées, par ailleurs, toujours protégées par un traité signé en 1851.

Les Premières Nations ont formé des bataillons de « protecteurs de l’eau » contre la violence des attaques de la police et autres milices. Ce combat a rassemblé 300 nations indiennes. Les voix des femmes se sont élevées pour rappeler : « nous sommes là c’est notre terre sacrée, « Mother Earth » est la grand-mère de tout ce qui est vivant, l’eau est son sang et avec ce sang nous vivons. »

Le président Obama avait fini par mettre fin, sous la pression des nations indiennes, à ce projet comme il avait aussi mis fin au très controversé Keystone XL Pipeline, l’oléoduc prévu pour transporter quelque 830 000 barils de pétrole brut vers le golfe du Mexique.

 

« Le prédateur en chef « 

Le candidat Trump, quant a lui, a affirmé durant toute sa campagne que le réchauffement climatique était un canular et a promis de redonner tous les pouvoirs aux pétroliers. Maintenant le président Trump et son gouvernement honorent cette promesse. Il représente une très forte menace pour l’environnement. Les membres des premières nations l’ont bien compris. Depuis l’arrivée des hommes blancs, leurs terres, leurs droits ne subissent que violations. Pour eux Donald Trump est maintenant « le prédateur en chef. »

Winona Laduke rappelle que l’état des infrastructures du pays est minable mais que les investissements se portent vers les compagnies pétrolières pour des productions dont les quantités ne justifient en rien ces oléoducs. Le prétexte de la création d’emplois est tout aussi futile ajoute-t-elle. Elle précise qu’une des personnes qui tirera profit de cette affaire sera Rex Tillerson, le nouveau « Secretary of State » (ministre des Affaires Etrangères) ancien PDG d’Exxon, la plus grande société de commerce pétrolier du monde. Exxon, sans surprise est le dealer de ce pétrole. Rappelons que Donald Trump détenait encore des actions de ETP (Energy Transfer Partner) en 2016 et a reçu une contribution de 100 000 dollars pour sa campagne. Quant à Rick Perry, il siégeait au conseil d’administration du groupe, il est maintenant en charge du département de l’Energie dans le gouvernement Trump.

Face à cette coalition quelque peu mafieuse, les premières nations rappellent les principes de vie sur terre. Elles voient l’oléoduc comme un serpent noir qui menace la source de vie.

Bobbi Jean Three Legs, une jeune activiste a organisé avec son frère une course relais de jeunes de 13 à 30 ans sur Washington DC pour alerter les populations de cette catastrophe environnementale. Bobbi Jean Three Legs dit qu’elle a peur pour les générations à venir. Sur son T-shirt on peut lire l’eau est la vie, l’eau est sacrée. Elle rappelle les violences policières et les quelques 600 personnes qui ont déjà été arrêtées.

Le gouverneur du Dakota du Nord avait émis un ultimatum pour l’évacuation de tous les camps de résistance pour le 22 février.  Le camp de Sacred Spirit (l’esprit sacré) qui a été la première base de la résistance, avait invité les femmes de toutes les nations indiennes à se joindre dans un moment de prières, de partage, et d’unité les 18 et 19 février, quelques jours avant l’évacuation. Ce rassemblement était appelé « honoring our grand mothers » (honorer nos grands-mères).

Avant d’évacuer en mettant le feu aux camps, « les protecteurs de l’eau » ont rappelé une fois de plus aux autorités américaines que les camps étaient sur des terres sioux sacrées, normalement protégées par le traité de 1851 de Fort Laramie. Le camp de résistance d’Oceti Sakowin, non loin de la réserve de Standing Rock a été le lieu du plus grand rassemblement des nations Sioux depuis la bataille de Little Bighorn en 1876.

Maintenant, la bataille va se poursuivre par voie de justice ainsi que par des rassemblements contre les projets destructeurs pour l’environnement.

Debra White Plume nous transmet cet important message : « quand ils menacent l’environnement, ils vous menacent. »

 

Brigitte Marti 50-50 magazine

Dessin Pierre Colin-Thibert 50-50 magazine

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