Articles récents \ France \ Politique Marie Lebec : « Ce que je souhaite, c’est que l’égalité ne soit plus un combat, mais une réalité »

Marie Lebec est candidate La République En Marche ! dans la 4ème circonscription des Yvelines. À 26 ans, elle est la plus jeune candidate de son parti en Ile-de-France. Diplômée de Sciences Po Bordeaux en Affaires Publiques, elle a travaillé 2 ans en tant qu’attachée parlementaire d’un député PS. Ancienne militante LR, elle est aujourd’hui consultante en affaires publiques dans une agence parisienne.

 

Que pensez-vous de l’absence de ministère des Droits des femmes au sein du nouveau gouvernement ?

Je pense que c’est un faux débat. Ce n’est pas une question d’intitulé. Pour moi, ce qui est important, c’est de voir à quel ministre le secrétariat d’État est rattaché et quelles sont ses compétences. Au-delà de ça, je suis contente de voir que pour une fois, ce n’est pas « le ministère des Droits des femmes, des maladies rares et des handicapés » … ! L’égalité c’est un combat qui est important, mais je ne suis pas choquée par l’absence de ministère, tout comme je ne l’aurais pas été si le ministère avait été créé. Ce que je souhaite, c’est que l’égalité ne soit plus un combat, mais une réalité.

 

Que pensez-vous de la parité imposée par Emmanuel Macron parmi ses candidat-e-s aux législatives ?

Ce qu’il faut savoir c’est qu’il s’agit d’une parité sur les circonscriptions gagnables. Ici par exemple, dans les Yvelines, comme En Marche ! a fait un très bon score à la présidentielle, on a 9 candidates LREM sur 12 candidat-e-s, ce qui est énorme ! Et j’en suis très contente : dans un territoire traditionnellement dominé par des hommes en politique, d’un certain âge et tous issus probablement du même parcours, je trouve super qu’on confie enfin des responsabilités à des femmes de tous milieux, de tout âge. Il y en a beaucoup qui n’ont aucun passé politique parmi les candidates investies. C’est un combat et un engagement fort de la part d’Emmanuel Macron, de donner aux femmes les mêmes chances qu’aux hommes pour l’emporter. J’espère que cette dynamique se poursuivra tout au long de son mandat.

 

Est-ce une bonne chose la grande proportion de candidat-e-s de la société civile investi-e-s par plusieurs partis ?

De mon expérience à l’Assemblée Nationale, j’ai observé une cassure entre les élu-e-s et les citoyen-ne-s. J’ai aussi trouvé qu’on était dans une logique bipartisane très forte, à tel point que même lorsqu’on élaborait des lois qui étaient reconnues par les deux partis comme allant dans le bon sens, comme la loi Macron ou la loi travail, quand il s’agissait de voter le texte en séance de manière formelle, les partis ne votaient plus par peur de ne pas pouvoir assumer le bilan.

L’Assemblée est une instance qui a des moyens exceptionnels pour travailler, mais elle a vraiment besoin d’être réformée, et je pense que la seule solution c’est de faire entrer des gens qui ont un autre regard sur la politique. Je pense que les gens de la société civile sont des gens qui sont très attachés à leur métier, et qui n’ont pas forcément vocation à cumuler les mandats dans le temps. Je sais moi-même que je ne ferai pas de la politique mon métier, si je suis élue. En revanche, je pense qu’il est également impératif de reconnaître qu’il faut une professionnalisation des élu-e-s, notamment par la formation. Jusqu’à présent, on a été relativement bien encadré-e-s chez EM en termes de formation, et l’accompagnement devra se poursuivre pour les candidat-e-s élu-e-s, pour pouvoir être performant-e-s rapidement.

Je pense en tous cas que cela va apporter un regard neuf, plus concret, et peut-être une notion nouvelle à l’Assemblée qui est celle de productivité et de « rentabilité » vis-à-vis de l’électrice/l’électeur. Mais il va falloir également que les élu-e-s de la société civile abandonnent leur métier, et travaillent énormément pour combler leur « retard » sur les élu-e-s qui sont en politique depuis longtemps. J’ai beaucoup d’espoir dans Emmanuel Macron, mais également dans celles et ceux qui vont le représenter à l’Assemblée.

 

Concernant l’égalité femmes/hommes quelles seraient les premières lois à proposer ou à amender ?

Je pense en premier lieu à l’égalité des salaires. Je ne comprends même pas comment les inégalités salariales puissent encore exister… Je le vis moi-même au quotidien.

La seconde chose pour moi, c’est mettre fin au harcèlement. Sans tomber dans la censure, c’est également quelque chose que j’ai subi à de nombreuses reprises. Je souhaite vraiment qu’on mette fin à cet espèce de regard malsain sur les femmes, et surtout qu’on arrête de le banaliser. J’ai été extrêmement choquée par l’affaire Baupin, et par la décision de dire « les faits sont prescrits, donc surtout on ne fait rien ». Je ne remets pas en cause la notion de prescription, mais quand huit femmes se plaignent du même comportement d’un homme, surtout en politique, c’est inacceptable…

Je trouve que ça dédouane presque Denis Baupin, parce que c’est comme si on disait « au final ce n’est pas très grave, c’est passé », alors que dans le cas de François Fillon, si les actes qu’on lui reproche ne sont pas plus immoraux, le procès de société qui lui est fait est extrêmement violent. Je me permets de comparer les deux affaires dans la mesure où il s’agit de deux hommes politiques qui ont exercé des responsabilités au sein de leur parti, ou au sein d’un gouvernement… il s’agit quand même du Vice-Président de l’Assemblée Nationale ! Je ne comprends vraiment pas l’indifférence dont on a fait preuve vis-à-vis de Denis Baupin.

Je pense enfin que le fait qu’une nouvelle génération de citoyen-ne-s s’empare de ces sujets contribuera à faire bouger les choses dans le domaine de l’égalité femmes-hommes, en cassant les codes.

 

Qu’est-ce qui vous a poussée à vous présenter ?

Je suis quelqu’un d’assez patriote et j’ai été extrêmement déçue par l’attitude de la droite, dans le sens où elle a été incapable de se rénover. J’aurais rêvé qu’une personnalité comme Emmanuel Macron émerge au sein de la droite, jeune, dynamique, avec l’envie de travailler avec tout le monde, et je me demande pourquoi on n’a pas réussi à le faire. Il y a en effet des sujets qui divisent et qui diviseront toujours les partis, mais j’ai trouvé l’attitude de la droite peu constructive, notamment lors du vote de la loi Macron, alors que les député-e-s des deux camps avaient travaillé ensemble en commission. J’ai trouvé que ce comportement négatif nuisait à l’intérêt du pays. Ma conviction aujourd’hui c’est que peu importe que les idées viennent de la droite ou de la gauche, l’important c’est de savoir où on va et quel projet de société on dessine. On a besoin d’un projet à 10, 20 ans, et non d’un projet qui soit juste électoral.

J’ai découvert Emmanuel Macron en travaillant pour mon député socialiste. J’ai trouvé en lui quelqu’un de différent, d’un peu plus pédagogue. Ce qui m’a poussée à me présenter, c’est aussi le fait que j’ai été très touchée par sa démarche, au moment des candidatures, de s’adresser directement aux femmes pour les encourager à se présenter. Je l’ai trouvé très sincère.

 

Avez-vous surmonté des obstacles dans votre vie politique du fait d’être une femme ?

À ce jour, je n’en ai pas encore eu vraiment le sentiment. Je n’ai jamais ressenti que le fait d’être une femme était un désavantage. Il se trouve par ailleurs que la majorité de mon équipe de campagne est composée d’hommes, et ils me soutiennent entièrement sans se poser de question par rapport à mon genre. Les militants, bien qu’assez paternalistes à mon égard parfois, sont très réceptifs à ma candidature et bienveillants.

Je trouve en revanche que c’est le regard qu’on porte sur moi en général qui est assez agaçant, notamment en tant que jeune femme. Il y a beaucoup de gens qui me parlent du fait que je sois jeune ou que je sois une femme. Mais ce n’est pas ma grille d’analyse, et je n’en fais pas un argument de campagne ! Les gens me disent « oui, mais on doit quand même le prendre en compte… ». Non, on ne doit pas le prendre en compte ! Est-ce que le seul référentiel que vous avez pour lire qui je suis, c’est le fait que je sois jeune et une femme ?! Non, je suis de droite, je crois dans le projet d’Emmanuel Macron, et les compétences que j’ai ne sont liées ni à mon genre ni à mon âge. Je n’y peux rien… ! Je fais partie intégrante de la société, j’y contribue financièrement, économiquement, je ne vois pas pourquoi les jeunes femmes ne pourraient pas être représentées.

Dans ma circonscription, la majorité des candidat-e-s est composée de femmes. Mais mes principaux concurrents sont des hommes, maires d’un certain âge, qui au début portaient sur moi un regard mi amusé mi méprisant. Aujourd’hui, après avoir vu la dynamique qui s’installait, ils me disent « que le meilleur gagne, hein ! »… J’aimerais vraiment gagner pour déconstruire leur lecture dépassée et vieillotte de la vie politique.

 

Propos recueillis par Mathilde Tobias 50-50 Magazine

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