Articles récents \ Île de France \ Économie Pierrette et Tania FO – André: « la situation risque d’être encore plus difficile avec la loi travail » 2/2

Pierrette travaille depuis 29 ans chez André, aujourd’hui dans une boutique de Paris, et milite depuis 9 ans à Force Ouvrière, elle est membre de la commission égalité hommes/femmes du syndicat. Tania est engagée depuis 16 ans à Force Ouvrière et a commencé à travailler, il y a 25 ans, chez André à Cergy. Témoignage de deux femmes engagées, sur le monde merveilleux du commerce.

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                    Tania                                                                                     Pierrette

Pas de valorisation de salaire depuis 3 ans

Avant, il y avait une femme de ménage pour chaque magasin, un étalagiste, avant il y avait un poste/ un emploi. Aujourd’hui, vendeuses/vendeurs et responsables de magasin font tout, sont polyvalent-e-s, mais leur salaire, lui, n’est pas polyvalent. Plus tu apprends, plus tu fais de tâches, plus le salaire stagne. Cela fait 3 ans que nous n’avons pas eu de valorisation de salaire à tous les niveaux. Les dirigeants de Vivarte nous disent que la situation de l’entreprise ne permet pas d’augmentation, mais il y a eu un dirigeant qui est parti avec 3 millions d’€ alors qu’il est un des responsables des problèmes de la société. Nous ne demandons pas 3 millions d’€, nous demandons juste de quoi tenir face à l’inflation. Ils estiment que les cadres des magasins sont les mieux payé-e-s du groupe, plus que celles/ceux de Minelli par exemple. Mais en fait, les salarié-e-s sont payé-e-s 3 cts d’€ de plus que le SMIC, par mois, pas par jour !

Les salaires, c’est le SMIC pour les vendeuses/vendeurs quelle que soit la catégorie. Les primes d’ancienneté ont été gommées en 2012. Un accord passé avec la branche fait que tout nouvelle/nouveau arrivant-e n’a plus de prime d’ancienneté. La prime d’ancienneté est bloquée à 15 ans. Vous avez 117 € après 15 ans d’ancienneté.

Tous les acquis sont partis.

Ils veulent se séparer des ancien-ne-s car leur salaire sont un peu plus élevés que ceux des nouvelles/nouveaux. On a 117 € de plus que les nouveaux, ce n’est pas grand chose pour nous mais pour eux c’est beaucoup et il y a beaucoup d’ancien-ne-s salarié-e-s.

Les jeunes ne restent pas, il y a un turn over très important. On vous fait faire le travail de 2 ou 3 personnes avec le salaire d’1 personne. Il n’y pas de reconnaissance. Vous ne pouvez rien faire avec un 20h ou un 15h, vous ne pouvez pas vous loger. De nombreux étudiant-e-s ne restent pas. Ce qui signifie que nous passons notre temps à recruter et à former.

Vu la dégradation des conditions de travail, les salarié-e-s sont à bout et il commence à y avoir des burn out, surtout chez les responsables de magasin. Car le problème des responsables est qu’elles/ils sont au forfait jour et peuvent faire une journée de 11 h ou une journée de 4 h. Mais vous faites plus 11 h que 4 h car vous ne pouvez pas laisser les vendeuses/vendeurs toutes seules, et donc vous venez travailler par solidarité. La direction connaît la mentalité des salarié-e-s, elle sait que les responsables de magasin ne vont pas laisser les vendeuses/vendeurs toutes seules.

La loi c’est 35 h mais notre DRH nous dit « non, non, c’est 39 /40 h pour un cadre. »

Il y a des jeunes qui en veulent et pensent qu’en faisant beaucoup d’heures elles/ils vont percer. Il y a les ancien-ne-s qui ont une conscience et ne peuvent pas laisser leur équipe dans l’embarras. Donc, on éponge les heures. La direction s’y retrouve toujours car quoiqu’il arrive, il y a très peu de cadres qui ne soient pas investi-e-s dans leur travail. C’est gagnant /perdant.

Le problème est que la situation risque d’être encore plus difficile avec la loi travail et on le sait, le président Macron ne veut pas revenir sur cette loi.

Les dimanches Macron

FO est contre le travail du dimanche. Nous syndicalistes d’André avons eu beaucoup d’avancées concernant le travail du dimanche. Il y a d’ailleurs beaucoup de syndiqué-e-s même parmi les travailleuse/travailleurs lambda, la direction ne le sait pas toujours. Le dimanche, on a réussi à obtenir 200 % du salaire alors que les autres entreprises n’ont eu que 100%. 

Nous voulons que tou-te-s puissent avoir un salaire convenable sans être forcé-e-s de venir travailler le dimanche, car aujourd’hui la stratégie de la direction, c’est de vous sous-payer pour vous forcer à venir travailler le dimanche. Si nous avions des rémunérations convenables, nous ne serions pas forcées de travailler le dimanche. Mais lorsque tout augmente sauf les salaires, nous n’avons pas le choix.

Les temps partiels, en particulier travaillent les dimanches parce qu’avec un contrat de 15h, vous ne  touchez que 567 € par mois et personne ne peut pas vivre avec ce salaire. Le salaire, c’est 75€ pour 7h de travail les dimanches Macron, 105€ les autres dimanches.  Elles/ils récupèrent ce temps. Mais, même cela, la direction veut le supprimer. Nous sommes là pour progresser pas pour régresser.

La DRH revient vers nous en disant « chez Minelli on ne fait pas comme ça. Chez André vous êtes les mieux payé-e-s, dans les autres structures elles/ ils sont moins payées » Nous, chez André, on s’est battues pour obtenir cela. On n’ a rien pu faire contre les dimanches Macron, mais la DRH veut que l’on signe pour une rémunération à la baisse, nous sommes contre bien évidemment. FO ne veut pas signer, on pense que la CFDT signera, ils n’ont que 30 % mais ils ne peuvent pas signer l’accord seul, la direction sera obligée de mettre en place un référendum par boutique. Alors nous passons dans chaque boutique pour expliquer que si il y a un référendum, il faut voter contre. Mais c’est compliqué, car dans les centres commerciaux ils ont une obligation d’ouvrir le dimanche, sinon ils perdent le bail.

Si les salarié-e-s disent non, la direction sera contrainte et forcée de refaire un référendum mais en proposant plus. Les salarié-e-s sont dans la crainte de perdre leur emploi. Il peut y avoir un manager du magasin ou directeur de la région qui explique « si vous n’acceptez pas, on ferme la boutique». Ils font peur aux gens.

Mais nous nous ne sommes pas dupes. Nous les laissons parler, ils nous font rire, mais dans les magasins certain-e-s ont peur, on peut les comprendre. Les dimanches aident certain-e-e-s à boucler les fins de mois, des femmes seules surtout.

Pierrette et Tania FO – André

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