Articles récents \ DÉBATS \ Tribunes Nous n’attendrons pas un siècle !

Le 20 novembre, le colloque annuel 2017 de la Commission européenne sur les droits fondamentaux commençait à Bruxelles . Alors que l’égalité entre les femmes et les hommes semble peu progresser et régresse même dans certaines parties de l’Union Européenne, la Coordination française du Lobby Européen des Femmes (CLEF) s’associe à la campagne du Lobby Européen des Femmes (LEF) pour relayer un message de solidarité et de changement entre toutes les femmes européennes.

Est-ce l’Europe que nous voulons ?

 Il est important de savoir jusqu’où nous sommes parvenu·es à renforcer les droits des femmes au cours du siècle dernier. En tant que Lobby Européen des Femmes, la plus grande alliance d’organisations de femmes, nous reconnaissons l’importance des efforts de l’Union européenne (UE), car l’égalité entre les femmes et les hommes est l’une des «valeurs fondatrices» de l’UE. Les mouvements des femmes ont été des acteurs clés, en collaborant avec les gouvernements, les syndicats, les entreprises et les institutions de l’UE pour introduire des changements réels et durables dans la vie des femmes et des hommes dans toute l’Europe.

Malgré tout, l’égalité des sexes en Europe a stagné et même reculé dans certains domaines. Récemment, les données de l’indice de l’Institut européen pour l’égalité des genres 2017 ( EIGE ) ont montré que les femmes sont toujours traitées en tant que citoyennes de second rang en Europe. Les stéréotypes de genre profondément enracinés entraînent une ségrégation professionnelle sur le marché du travail car les secteurs dans lesquels les femmes travaillent sont sous-évalués et sous-payés. Les revenus moyens des femmes perçus tout au long de leur vie sont inférieurs de près de 40% à ceux des hommes, ce qui, à long terme, a des répercussions sur leur indépendance économique et leur exposition à la pauvreté.

Le fardeau du travail informel non rémunéré et du travail précaire mal payé continue de peser sur les épaules des femmes – en particulier sur les femmes migrantes et , comme le montre clairement l’EIGE, les femmes n’ont tout simplement pas le temps de s’ investir dans le travail rémunéré et dans la participation politique. Les hommes continuent de dominer les postes de direction dans les puissantes banques centrales, les ministères des finances et dans les premières positions des plus grandes entreprises.

Nous savons qu’une femme sur trois dans l’UE, soit 62 millions de femmes, a subi des violences physiques et/ou sexuelles depuis l’âge de 15 ans. La violence faite aux femmes ne connaît aucune frontière géographique, aucune limite d’âge, aucune distinction de classe, de race ou de culture et se manifeste sous des formes multiples et implique une grande variété d’auteurs, de partenaires intimes, des membres de la famille à des collègues de travail.

Les femmes se mobilisent, fortes et unies

Le populisme est en hausse en Europe. Issu de la peur, de la pauvreté et de l’inégalité. Alimenté par la manipulation des médias et de l’information, il est un mélange empoisonné de patriotisme, du patriarcat, de traditions et de nostalgie. Il s’agit de pouvoir et de contrôle accaparés par les forces traditionnelles, toujours au détriment des femmes.

Dans le même temps, nous vivons dans une période où l’engagement pour les droits des femmes est sans précédent. La mobilisation des femmes dans la rue, sur les réseaux sociaux, traverse tous les secteurs au – delà des frontières et des divisions politiques. De Pologne en Grande-Bretagne; de la Turquie à la Hongrie, les femmes sont au premier rang de la mobilisation contre les populistes, les fascistes et pour une Europe plus égale, plus durable et plus pacifique.

Il est temps

Il est temps que l’impulsion politique désormais ravivée place les droits des femmes et l’égalité des genres au centre du projet européen. Il est temps d’agir de manière urgente ; au niveau européen et mais aussi au niveau des États membres. Le Colloque est l’occasion idéale pour lancer ce processus afin de replacer la voix des femmes au cœur du débat politique sur l’avenir de l’Europe.

L’Union européen ne peut et doit montrer la voie,

a) Par une stratégie politique pour l’égalité des genres et les droits des femmes; permettant le suivi des politiques, de la législation au niveau de l’UE et au niveau national, par le biais de rapports annuels au Parlement européen et d’un contrôle par le biais d’une réunion ministérielle annuelle sur l’égalité des genres. La stratégie devrait également définir notre respon sabilité au niveau de l’UE et au niveau de l’UE vis-à-vis de la CEDAW, de BEIJING, des ODD.

b) Avec des institutions qui n’établissent aucunes discriminations fondées sur le genre, du niveau local au niveau de la représentation égale dans toutes les institutions de l’UE.

c) A travers un budget sensible au genre et un cadre financier pluriannuel. Des ressources spécifiques doivent être disponibles pour les droits des femmes et pour les Central Statistics Office des femmes dans l’UE, les pays voisins et les pays en développement.

d) Avec une politique globale et un cadre légal qui nous permette de mettre fin à toutes les formes de violence masculine contre les femmes à tous les niveaux, y compris par la ratification et la mise en œuvre par l’UE et tous ses Etats membres de la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, la Convention d’Istanbul; et la nomination d’un·e coordinateur·rice de l’UE sur la violence contre les femmes et les filles, dans le cadre des travaux de la Commission européenne sur l’égalité entre les femmes et les hommes.

Nous savons ce qui fonctionne, nous savons ce qu’il faut faire pour changer la situation et nous savons ce qui est possible : c’est désormais une question de volonté politique ! Nous avons besoin d’un vaste programme d’investissement dans les droits des femmes. Nous savons qu’il n’est pas seulement possible d’atteindre l’égalité de genre, mais c’est aussi nécessaire. Nécessaire pour des sociétés plus saines, plus égalitaires et plus durables.

La Présidente Edith Schratzberger – Vecséi :  » Nous avons de l’espoir: nous espérons renforcer le pouvoir et la voix des femmes pour façonner l’avenir de l’Europe. En particulier, nous avons été et continuons d’être inspiré·e·s par la profondeur et l’ampleur du plaidoyer et de la mobilisation des jeunes femmes en Europe. Ils ont compris qu’à ce rythme de progrès, ils ne verront pas l’égalité dans leur vie. Ce n’est tout simplement pas acceptable. Ensemble, nous n’attendrons pas un autre siècle pour une véritable égalité entre les sexes. »

Lobby Européen des Femmes

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