Articles récents \ France \ Société L’éducation à l’assaut des inégalités filles/garçons

Pendant les 18 ans que dure en moyenne leur scolarisation, les élèves passent environ 30 heures par semaine à l’école. Elle est leur lieu d’apprentissage et de socialisation privilégié et doit donc être un lieu de sensibilisation aux inégalités, en particulier aux inégalités entre les femmes et les hommes. Pourtant, le milieu éducatif a encore des progrès à faire en matière d’égalité, en particulier dans le domaine de l’éducation à la sexualité.
L’émergence de mesures par l’Education nationale : le Réseau Canopé
En 2017, un rapport du Haut Conseil à l’Egalité (HCE) le démontrait : les personnels enseignants et d’éducation participent, à leur échelle, à la pérennisation de stéréotypes sexistes.  Ils ont des comportements différents envers les filles et les garçons, évaluant par exemple les élèves différemment selon leur sexe. Pour sensibiliser les élèves à l’égalité entre les filles et les garçons, il est donc nécessaire de former les enseignant.e.s en amont à cette question.
Un impératif que l’Education nationale a saisi, puisqu’elle a lancé le site « outils pour l’égalité entre les filles et les garçons ». Placé sous la tutelle du Réseau Canopé, il  s’agit d’une plateforme qui met à la disposition de la communauté éducative des ressources pédagogiques. Le site présente les textes fondateurs de l’égalité entre les filles et les garçons et insiste sur les enjeux de sa mise en place. Plus encore, il propose des pistes d’actions, tant au sein de l’établissement scolaire qu’au niveau plus centré d’une classe. Il propose une méthodologie ainsi que des exemples de projets en établissements scolaires. Il offre des pistes pédagogiques pour les enseignant.e.s, afin de leur apprendre à repérer des stéréotypes sexués. Enfin, il met à leur disposition des dispositifs de formation, ainsi que des liens vers des structures institutionnelles ou associatives qui proposent des ressources.
Réécrire les manuels scolaires
La mise en place d’une éducation plus égalitaire passe également par les ouvrages d’apprentissage. En effet, les manuels scolaires restent eux aussi marqués par les stéréotypes ; dans les programmes comme dans les ouvrages scolaires, la place des femmes est minorée et elles restent cantonnées à des rôles traditionnels.  Il est donc indispensable de repenser les livres scolaires.
Un manuel avait dans ce domaine fait parler de lui : en mars 2017, les éditions Hatier avaient édité le manuel Questionner le monde. Cet ouvrage, destiné à des élèves de CE2, utilise l’écriture inclusive et explique qu’il a décidé « d’équilibrer autant que possible le nombre de femmes et d’hommes présentés ».
Il s’agit la d’une initiative isolée, mais l’idée a depuis été reprise par le  Salon des Dames, qui réécrit depuis un an avec L’Espace des femmes les manuels de littérature, en réintégrant de la 6ème à la terminale plus de 250 femmes autrices.
Reconnaître l’absence d’éducation à la sexualité
En 2015, un rapport du HCE relatif à l’éducation à la sexualité, mettait en lumière les inégalités filles/garçons et les représentations empreintes de stéréotypes existantes en matière de sexualité. Il soulevait l’importance d’une éducation sexuelle pertinente dans le développement des jeunes et la vision qu’elles/ils développent des relations entre les filles et les garçons.
En France, des mesures ont été mises en place par l’Education nationale, mais leur application est lacunaire. La loi du 4 juillet 2001 inscrit dans le code de l’éducation qu’une « information et une éducation à la sexualité sont dispensées dans les écoles, les collèges et les lycées à raison d’au moins trois séances annuelles et par groupes d’âge homogène  », et que ces séances «  contribuent à l’apprentissage du respect dû au corps humain ». La loi du 13 avril 2016 ajoute que « ces séances présentent une vision égalitaire des relations entre les femmes et les hommes ».
L’application effective de ces dispositions demeure néanmoins incomplète : 25 % des écoles interrogées par le HCE, à l’occasion de son rapport, déclarent n’avoir mis en place aucune action en matière d’éducation à la sexualité. De plus, lorsque l’éducation à la sexualité est mise en place, elle est largement concentrée sur des aspects scientifiques tels que l’étude de la reproduction, la contraception, le VIH/Sida. La notion de « respect » entre les sexes, est parfois abordée, mais les questions de violences sexistes et sexuelles ou d’orientation sexuelle sont les moins abordées.
Lutter contre l’inégalité dans l’éducation sexuelle : l’initiative du site SVT Egalité
Le HCE, dans son rapport de 2015, avait publié un ensemble de 30 recommandations, posant les bases d’une action étatique.  Plusieurs projets associatifs ou collaboratifs ont vu le jour en marge des initiatives proposées par le gouvernement. Certains d’entre eux sont centrés sur la déconstruction des stéréotypes de genre, en particulier dans l’éducation à la sexualité.
Parmi ces initiatives, on relève l’action de SVT Égalité. Ce projet collaboratif compile des réflexions et des ressources pédagogiques en matière d’enseignement des sciences de la vie et de la Terre (SVT) au collège et au lycée. Dans son approche, il prend en compte les discrimination liées à l’orientation sexuelle et à la sexualité, la transidentité, l’intersexuation. Parmi les sujets traités, une grande place est laissée à l’éducation à la sexualité. Le site recense des ressources (sites, BD) qui traitent tout à la fois de la représentation du corps, du plaisir, de la lutte contre les IST. Il propose aussi une réflexion autour des stéréotypes et des tabous entourant la sexualité, dénonçant le biais genré avec lequel elle est souvent présentée.
Le site s’intéresse aux programmes officiels mais aussi à l’ensemble de « ces choses qui s’acquièrent à l’école (savoirs, compétences, représentations, rôles, valeurs) sans jamais figurer dans les programmes officiels ». Il insiste sur le fait que l’école est un lieu de vie nous devons nécessairement investir pour parvenir à l’égalité filles/garçons.
 
Pauline Larrochette 50-50 magazine

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