Foot au féminin Une équipe de foot féminin, côté vestiaire

Dans le vestiaire, avant ou après le match, les footballeuses de Saint-Malo que Laetitia Foligné a filmées se soutiennent, s’encouragent, partagent leurs espoirs ou leurs déceptions. Pour la réalisatrice du documentaire Le Vestiaire des filles, une équipe de foot féminin, c’est comme une micro-société.

Laetitia Foligné, le mois prochain sort votre documentaire Le Vestiaire des filles. Que souhaitez-vous montrer avec ce film ?
Premier parti pris : on ne verra aucune image de match. Tout se passe dans les vestiaires, le but n’étant pas de montrer des images de foot pour prouver que les filles savent jouer. Mon second parti pris : le style du documentaire, sans commentaire off, sans interview. On laisse ainsi au réel le temps d’émerger et donc aux spectateurs le temps de s’en imprégner. La particularité de l’équipe de Saint-Malo que j’ai choisi de filmer, c’est qu’il s’agit d’une micro-société féminine avec des femmes plus âgées, d’autres plus jeunes, des étudiantes et des mères de familles, des personnes qui travaillent dans tous les secteurs, qui viennent aussi bien de la ville que de la campagne alentour. Au sein de l’équipe, j’ai resserré mon propos sur deux personnages, Soizic, la capitaine qui a 42 ans et était déjà à l’origine du club il y a quinze ans, et Anaïs, une fille de 20 ans. C’est cette diversité et cette solidarité qui fait le sujet de mon film.

Vous dites que les filles (ou les femmes) ne pratiquent pas le même football que les hommes ?
Il y a autant de motivations que de filles. Elles viennent chercher avant tout un groupe d’amies, même si elles cherchent aussi à se dépasser soi-même, pour le groupe. Donner le meilleur de soi-même et ainsi permettre à l’équipe d’aller le plus loin possible. Ce qui domine avant tout est un esprit de solidarité, un esprit d’entraide. Soizic, la capitaine, dit qu’à la sortie d’un match de garçons, on entend « On a perdu, ce n’est pas de ma faute » ; s’il s’agit d’un match de filles, en tout cas à Saint-Malo, c’est « On a perdu, c’est de ma faute, je suis désolée » ; chacune a tendance à se remettre en question et se sent responsable.

Comment avez-vous commencé à vous intéresser au football ?
En regardant une finale de coupe du monde quand j’avais dix ans. Je revois encore l’image de Franco Baresi, qui pleurait comme un gamin parce qu’il venait de perdre la finale. Le foot a commencé à m’intéresser, mais je trouvais injuste qu’il n’y ait pas de joueuses. Du coup je me suis dit que footballeur serait un métier génial. J’ai cherché des centres de formation. Mais il n’y en avait pas pour les femmes, ce qui m’a révoltée. Je me suis dit que l’on pourrait monter une équipe dans mon petit village, Dol de Bretagne; avec quelques copines, qui n’étaient pas plus motivées que ça pour certaines, mais qui voulaient me faire plaisir, nous avons dressé une liste pour la mairie, qui nous a éconduites. Cela nous a mises en colère et nous avons placardé des annonces dans les supermarchés : « Nous recherchons des filles pour monter une équipe féminine ». Finalement, c’est une des joueuses de l’équipe de Saint-Malo qui a vu ce message et nous a contactées. Cela a été notre chance. Et de la fameuse liste de départ, nous ne sommes plus que deux aujourd’hui à jouer à Saint-Malo.

Vous définissez-vous comme militante féministe ?
Je ne savais pas que j’étais militante au moment où j’ai commencé ce film. Pourtant depuis le début, la phrase d’accroche de mon dossier de production est une citation de Pierre de Coubertin : « Une olympiade de femelles est impensable, impraticable, inesthétique et incorrecte. Le véritable héros olympique, c’est l’adulte mâle ». Et moi j’ai ajouté : « Le but de ce film n’est pas de montrer qu’il a tort, car nous le savons déjà!»

Propos recueillis par Geneviève ROY ÉGALITÉ

Le Vestiaire des filles, de Laetitia Foligné, production des films de l’Autre côté, 52 mn, sortie officielle le 18 décembre (à 11 heures au cinéma l’Arvor à Rennes) puis sur TV Rennes et en festivals.

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