Non classé Primaire citoyenne / Huit questions à Ségolène Royal sur l’égalité

Ségolène Royal

EGALITE a adressé un questionnaire aux six candidat-e-s à la primaire citoyenne, qui aura lieu les 9 et 16 octobre prochains.
Les huit mêmes questions portent sur les intentions des candidat-e-s en matière d’égalité entre les femmes et les hommes.

Nous les publions par ordre d’arrivée à notre rédaction, et jusqu’au 8 octobre, veille du premier tour de l’élection.

Les réponses de Ségolène Royal, présidente socialiste du conseil régional de Poitou-Charentes.

Après l’adoption des lois Roudy et Génisson, notamment, que comptez-vous faire pour une réelle application des lois sur l’égalité professionnelle? Envisagez-vous des sanctions ?

L’égalité professionnelle est une obligation constitutionnelle depuis 1946. Malgré cela, et malgré les lois votées par la gauche, l’égalité dans le recrutement, les salaires et l’évolution des carrières n’est toujours pas une réalité. Ce combat concerne tous les niveaux de l’entreprise.

Il faut créer des mécanismes d’incitation et de sanction en conditionnant les aides publiques aux entreprises au respect de l’égalité professionnelle. C’est ce que j’ai fait dans ma région avec une charte d’engagements réciproques. Ce principe sera étendu à l’ensemble du territoire national, pour toutes les interventions de l’Etat et des collectivités locales.

Je souhaite également que dans chaque entreprise, comme au Canada, un(e) responsable de l’égalité et du respect des droits des femmes soit désigné(e). Ce(tte) responsable pourra être saisi(e) de tout sujet concernant les femmes (égalité salariale, harcèlement sexuel, etc.) et travaillera en lien avec les syndicats et la direction régionale du travail.

En raison des inégalités de carrière, les retraites des femmes sont en moyenne inférieures de 38% à celles des hommes. La récente réforme les a pénalisées encore plus. Comment prévoyez-vous de corriger cette inégalité ?

Je rétablirai le droit à la retraite à 60 ans pour celles et ceux qui ont travaillé dur depuis longtemps et qui ont leur durée de cotisation. Dans le cadre de la remise à plat de la reforme des retraites, nous ouvrirons une discussion avec les partenaires sociaux pour une réforme juste et efficace des retraites, qui sécurise leur financement. Dans ce cadre je souhaite que l’amélioration des petites retraites et le rétablissement de la retraite à taux plein à 65 ans soient des priorités. Les femmes sont les grandes perdantes des réformes successives qui ont abouti à abaisser le niveau de leur pension, surtout pour celles qui ont des carrières incomplètes.

Malgré la loi sur la parité, les femmes ne représentent que 13,8% des élu-e-s des conseils généraux, 18,5% des députés, ou 14% des maires. Pour une réelle parité politique qu’adopterez-vous en termes de financement, de cumul des mandats ? Reviendrez-vous sur la réforme des collectivités territoriales ?

J’ai depuis longtemps pris deux engagements très clairs : avec moi, le cumul des mandats sera interdit et les partis politiques qui ne respectent pas la parité ne toucheront plus aucun centime de l’Etat. Je suis moi-même passée du discours à l’acte, puisque je ne me suis pas représentée à la députation. Au sein de mon conseil régional, je suis allée plus loin que les obligations légales sur la parité, puisque toutes les commissions sont paritaires et présidées par des femmes et des hommes à égalité.

La Fédération nationale solidarité femmes (FNSF) dénonce la baisse de financement pour les centres d’hébergement, d’accueil et d’écoute des femmes victimes de violences, et pourtant le nombre d’appels au 3919 a augmenté de 50,2% entre 2009 et 2010. Envisagez-vous des modalités et sources de financement nouvelles ?

Comme je l’ai déjà dit, la lutte contre les violences est une priorité qui appelle une réponse globale, dont font partie les questions de l’accueil et de l’hébergement d’urgence. Dans ma région, nous avons commencé, à la demande des associations qui viennent en aide aux victimes, par mettre en réseau tous les acteurs du territoire pour rendre plus efficace ce qui existe déjà et permettre des solutions rapides pour les femmes. Je complèterai la loi de 2010 et donnerai les moyens de l’appliquer.

Que ferez-vous pour favoriser un meilleur accès aux modes de contraception et à l’IVG ?

J’ai été la première à créer le Pass’Contraception. En Poitou-Charentes, chaque lycéenne mineure peut depuis 2009 accéder de façon anonyme et gratuite à une consultation médicale, aux examens nécessaires et à la délivrance d’un contraceptif. Présidente de la République, je généraliserai à tout le pays cette possibilité et je rendrai la contraception gratuite pour les jeunes de moins de 25 ans, qui représentent la moitié des interventions volontaires de grossesse (IVG) aujourd’hui.

Il faut également renforcer la prévention des grossesses non désirées. Cela passe notamment par le respect de la loi de 2001 sur l’éducation sexuelle et une meilleure information sur les modes de contraception adaptés à chaque situation. Pour cela, je rétablirai les aides au Planning familial.

Enfin, le droit à l’IVG doit être garanti et effectif pour toutes. Cela passe par la défense des services de santé de proximité, en particulier dans les zones rurales et dans les quartiers qui sont devenus des déserts médicaux.

Seriez-vous favorable à l’introduction de modules d’apprentissage à l’égalité filles/garçons dans toutes les structures éducatives, dès la petite enfance ?

J’y suis tout à fait favorable. Dès le plus jeune âge, les filles et les garçons doivent pouvoir s’affranchir des stéréotypes de genre. Les hommes eux-mêmes sont aujourd’hui prisonniers du système de domination masculine. L’émancipation des femmes sera aussi la leur, même s’ils ont parfois du mal à l’admettre. Cette problématique sera partie intégrante de la formation des enseignants que je rétablirai, car l’école doit être en première ligne pour apprendre aux enfants l’égalité et le respect mutuel.

Y aura-t-il un ministère des Droits des femmes à part entière, si vous êtes élu-e? Quelle sera sa première mesure emblématique ?

Oui, je m’y engage. Ce ministère sera chargé de garantir l’application de la parité politique, sociale et professionnelle, de lutter contre les stéréotypes de genre, de faire respecter les droits des femmes sur le contrôle de leur corps. Il impulsera la prise en compte de la dimension du genre dans toutes les politiques publiques.

Je l’avais dit en 2007 – et la situation ne s’est pas améliorée depuis, au contraire – la priorité doit être donnée à la lutte contre les violences conjugales qui sont une forme de criminalité intolérable.

Pouvez-vous nous dire également quelle commission, dans votre comité de campagne, traite des questions d’égalité entre les femmes et les hommes ?

Comme moi, celles et ceux qui m’entourent savent à quel point cet enjeu est essentiel et doit être intégré à toutes mes propositions, qu’il s’agisse d’emploi, de création d’entreprises, de pouvoir d’achat, de transports, d’éducation, de santé. L’égalité entre les femmes et les hommes ne doit pas faire l’objet d’un traitement à part.

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