Articles récents \ France \ Économie "Soyez du genre à faire des études d'ingénieur-e-s !"

Le mot d’ordre de cette remise des prix  « Ingénieuses 2016″ était à destination des jeunes filles : « osez ! », osez faire des études d’ingénieur-e-s, osez monter des projets innovants, osez entreprendre une carrière scientifique ! La Conférence des directeurs des écoles françaises d’ingénieur-e-s (CDEFI) organise le concours des Ingénieuses pour la 6e année consécutive. L’objectif est de promouvoir les projets d’inclusion menés par les étudiant-e-s ingénieur-e-s et de soutenir les ingénieures d’aujourd’hui et de demain.

Le nombre d’étudiantes dans les écoles d’ingénieur-e-s progresse mais ce n’est pas suffisant au regard d’une réelle égalité des chances entre filles et garçons. Elles sont aujourd’hui 132 000 élèves contre 25 000 dix ans auparavant, soit en moyenne 28,4 % (1) des effectifs des écoles en France. Il existe de fortes disparités dans les choix des domaines scientifiques par les filles au sein même des écoles : alors que l’on constate une certaine parité dans la chimie-physique, les jeunes filles sont très minoritaires dans le numérique (15%), la technologie et l’énergie. « Les journées ingénieuses visent à briser cet état de fait pour que les jeunes femmes s’impliquent dans ces domaines » explique François Cansell, directeur de la CDEFI. De grandes opportunités professionnelles s’ouvrent dans les secteurs justement délaissés par les filles alors que les entreprises sont enclines à faire valoir la diversité des profils et à féminiser leurs équipes.
 
L’engagement des écoles d’ingénieur-e-s pour l’égalité filles/garçons
La CDEFI est depuis longtemps préoccupée par la faible présence des femmes dans les domaines des sciences et de la technologie. En 2011, suite à la publication de rapports faisant état de ce déséquilibre, certain-e-s directrices/ directeurs d’écoles d’ingénieur-e-s lancent le programme « Ingénieuses » pour susciter des vocations chez les jeunes lycéennes et faire valoir les actions des écoles. La CDEFI va prochainement diffuser un « guide des bonnes pratiques dans les écoles d’ingénieur-e-s » pour capitaliser et échanger leurs expériences en la matière et accompagner les programmes d’égalité filles / garçons. Simone Bonnafous, directrice générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle au Ministère de l’Education Nationale, a félicité lors de cette 6e édition « le vrai engagement des hommes ingénieurs et de la CDEFI sur ce sujet. » Le prix des Ingénieuses fait l’objet d’un intérêt accru de la part des écoles et des ingénieures en activité, au regard de l’important nombre de candidat-e-s cette année.
 
Les modalités du prix des Ingénieuses
Le 19 mai dernier, au Ministère des affaires sociales et de la santé, les directrices/directeurs des écoles d’ingénieur-e-s, les réseaux et associations, les ingénieur-e-s et les jeunes lycéen-ne-s se sont rencontré-e-s à l’occasion de  cette remise de prix. La CDEFI a récompensé les meilleurs projets étudiants dans les écoles accréditées, l’élève ingénieure France, l’élève ingénieure Maghreb et la femme ingénieure en activité. Vous pouvez découvrir ici tous les projets et candidats de cette session 2016.
L’événement est appuyé par le Ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, et le Ministère de la famille, de l’enfance et des droits des femmes et aussi par un tissu associatif large et des entreprises. L’association Pascaline, l’Agence universitaire de la Francophonie, Elles bougent, Femmes Ingénieurs, Wi-Filles, Suppléments Dames, Jamais Sans Elles, la Fondation L’Oréal s’investissent pour participer à un changement des pratiques en profondeur dans les lycées, écoles et dans les milieux professionnels, pour promouvoir la féminisation des métiers des sciences.
 
Sensibiliser aux stéréotypes de genre sur les métiers des sciences dès le secondaire !
Simone Bonnafous a rappelé l’importance des stéréotypes de genre qui pèsent sur les jeunes filles aux lycées dans leurs choix d’études supérieures. Alors qu’il existe une parité entre lycéennes et lycéens dans la filière scientifique, les jeunes filles, qui ont en moyenne de meilleurs résultats au baccalauréat, se lancent dans des études scientifiques moins audacieuses ou longues. Pour la directrice générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle, deux problèmes rentrent en jeu. Dans tous les domaines, bien que les jeunes filles soient très présentes dans les études supérieures, les hiérarchies sont occupées par des hommes. Les filles sont très majoritaires dans les sciences humaines et la littérature alors que peu d’opportunités professionnelles s’ouvrent à elles. Selon elle, il faudrait favoriser les formations mixtes entre sciences et sciences humaines pour les rendre plus attractives et pour permettre aux générations futures de comprendre le monde d’aujourd’hui de manière globale.
Les stéréotypes de genre sur les métiers scientifiques, c’est ce que combat la Fondation l’Oréal avec son programme « Les filles et la science » en se rendant dans les collèges et lycées pour déconstruire les idées reçues : « Métiers pour hommes », « pas de possibilité de vie familiale », « hommes célibataires enfermés dans des laboratoires » (2). La séance commence par deux films pour faire valoir l’égalité des capacités entre filles / garçons et la diversité des parcours professionnels. Une ambassadrice, ingénieure, intervient en tant que « rôle modèle ». En 2 ans, la Fondation L’Oréal a sensibilisé 30 000 élèves et effectue aussi des ateliers de sensibilisation en direction des professeurs.
 
Changer les mentalités dans les domaines professionnels
Eve Maillet, cheffe d’entreprise dans le bâtiment et vice-présidente de Supplément Dame, est venue présenter son métier et les activités de son réseau 100 % femmes d’influence. Les objectifs de Supplément Dame : rassembler les personnes qui entreprennent et qui participent à une « juste place des femmes dans l’économie et la société », favoriser l’ascension des femmes à des postes à responsabilités dans tous les domaines d’activités pour participer à un changement des usages professionnels.
Pour l’association Jamais Sans Elles, « l’égalité femmes/hommes est l’affaire de chacun. » Les femmes manquent de visibilité dans l’espace publique et leurs travaux ne sont pas reconnus à juste titre, c’est ce que dénonce cette association qui connait un vif succès sur les réseaux sociaux. Les actrices/acteurs du numérique, secteur dans lequel beaucoup de postes sont à pourvoir actuellement, ainsi que de nombreux hommes portent ce projet. Etienne Parizot, astrophysicien et membre de Jamais Sans Elles, s’engage à ne plus participer à des colloques ou à des rassemblements scientifiques  auxquels aucune femme n’est invitée à intervenir. A l’occasion de la journée des Ingénieuses 2016, il est venu faire part du franc succès que rencontre cette démarche dans le milieu scientifique, et qui aurait permis de faire intervenir des centaines de femmes lors de ces événements.
 
Mettre en lumière nos grandes scientifiques et inventer des rôles cadres
Jamais Sans Elles a présenté lors du prix des Ingénieuses un exposé sur certaines de nos inventrices émérites oubliées par l’Histoire :

Les femmes scientifiques sont à l’origine de révolutions majeures dans nos sociétés sans pour autant que leurs noms soient retenues dans l’histoire. Changer les mentalités c’est aussi confronter les idées reçues à la réalité. La CDEFI, la Fondation l’Oréal, le réseau Supplément Dame et certaines associations cherchent à mettre sous les feux des projecteurs nos grandes scientifiques et leurs inventions à travers des actions de communication. Qu’ont-elles inventé ? Tout ce qui a changé notre quotidien : la wi-fi, l’ancêtre de l’ordinateur, le chauffage central au gaz …
 
Charlotte Mongibeaux 50-50 Magazine
 
1 : Chiffres exposés par François Cansell, président de la CDEFI
2 : Éléments présentés par Diane Barras, Fondation L’Oréal

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