France \ Société \ Île de France \ Vidéos 50/50 Une maison pour les femmes à Saint Denis

Il fallait une maison pour prendre soin des femmes, c’était le vœu de Ghada Hatem depuis qu’elle était devenue chef de service de la maternité du centre hospitalier Delafontaine de Saint Denis. Le service de gynéco obstétrique reçoit des femmes de plus de 120 nationalités différentes et environ 14% d’entre elles ont été excisées. Après deux ans de travail et de bataille pour réunir les fonds, la maison des femmes a été inaugurée le 8 juillet dernier. En dehors des officiels, beaucoup s’étaient déplacé-e-s pour voir Inna Modja, la marraine de l’établissement, couper le ruban inaugural.

Interview de Ghada Hatem

Rien de plus fort pour ouvrir ce lieu d’accueil et de compréhension aux femmes les plus vulnérables que la présence à leur côté de l‘artiste malienne Inna Modja. Elle s’est impliquée dans la lutte contre l’excision ayant elle même été excisée à l’âge de 5 ans, puis ayant vécu la réparation comme une réparation physique et psychologique. Elle fait les liens entre toutes les violences faites aux femmes dans son engagement d’artiste.

Faire les liens est, en fait, la fonction de la maison des femmes, construite dans l’enceinte de l’hôpital mais avec une entrée indépendante ouverte sur la rue pour permettre aux femmes qui ont subi violences, humiliations ou autres problèmes de rentrer librement pour trouver le soutien d’une équipe. 

La sage-femme coordinatrice de la maison, Mathilde Delespine, nous parle de sa motivation sans faille pour ce
projet d’accompagnement global des femmes vulnérables pour qu’elles ne soient plus victimes.

 

la maison des femmes 1

Mathilde Delespine

Dans cette assemblée inaugural beaucoup étaient là parce qu’inspiré-e-s par Ghada Hatem et son équipe ; ainsi Sandra nous a dit avoir entendu une interview de Ghada Hatem à la télévision et être restée « bouche bée. » Quelques jours plus tard, elle a écrit a Ghada Hatem pour lui proposer de faire partie de cette aventure, et était là pour célébrer l’inauguration de la maison.

Moi aussi j’ai fait un rêve

J’ai rêvé que les femmes, qui sont tout à la fois la moitié du ciel, l’avenir de l’homme et le sel de la terre si l’on en croit les poètes, étaient devenues des êtres humains, libres, égales et fraternelles

J’ai rêvé qu’elles quittaient leurs habits de sorcière

J’ai rêvé qu’elles n’étaient plus de simples matrices productrices de chair à canon, des variables d’ajustement, des faire-valoir ou des souffre-douleurs

J’ai rêvé que leurs cheveux, leurs bras, leurs jambes n’étaient plus des incitations au viol

J’ai rêvé que leurs maris, leurs frères, leurs mères n’avaient plus droit de vie et de mort sur elles

J’ai rêvé que leur sexe à la naissance ne les condamnait plus à une mort immédiate

J’ai rêvé que leur hymen n’était plus la partie la plus importante de leur anatomie

J’ai rêvé que leur clitoris n’était pas un pénis à extirper

J’ai rêvé qu’elles avaient droit au plaisir, à la séduction, à l’autonomie, au pouvoir.

Les femmes ne doivent plus être la plus grande minorité opprimée vivant sur terre !

Parce que les femmes sont vos compagnes, messieurs, et aussi  des mères en devenir,

Parce que leurs enfants sont les citoyens de demain et qu’elles sont leurs toutes premières éducatrices,

Parce que le monde sera ce qu’ils en feront, et que nous sommes responsables des conditions dans lesquelles elles les mettent au monde et les aident à grandir.

Gadha Atem

La maison des femmes de Saint Denis recevra ses premières patientes dès le 15 juillet.

Elle proposera une unité planning familial, une unité Mutilations Sexuelles Féminines, une unité d’accueil violences, des groupes de parole avec la participation d’Inna Modja, des consultations femmes victimes de violence, des consultations d’inceste, et des consultations pédiatriques.

La demande est énorme et la maison des femmes de Saint Denis aura besoin du soutien de tout-e-s pour devenir un modèle à faire grandir et multiplier.

 

Brigitte Marti et Joachim Cairaschi 50-50 magazine

 

Photo de Une (de gauche à droite) : Didier Paillard (maire de St Denis),  Ghada Hatem, Ina Modja, Stéphane Troussel (président du conseil départemental), Mathilde Delespine.

 

Article déjà publié en septembre 2016

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