Articles récents \ Culture \ Cinéma Sandrine Goldschmidt : « c’est plus dur pour les femmes de faire des films »

Femmes en résistance, festival féministe de documentaires a 15 ans. Cette année la thématique est « résistance à la modestie ». Il aura lieu à Arcueil, espace municipal Jean Vilar, les 30 septembre et 1er octobre prochains. Sandrine Goldschmidt, organisatrice du festival, militante féministe, revient sur les origines de ce festival et présente la 15éme édition.

Comment le festival  est-il né ? Est-ce que la réalisation au féminin évolue ?

Le festival est né, il y a 15 ans, d’une équipe de femmes, qui souhaitait un festival dont le cœur de cible serait féministe et politique et qui présenterait des documentaires. Il y avait Cineffable (festival lesbien et féministe de Paris), il y a avait le festival de films de femmes de Créteil, mais il n’y avait pas de festival tel que Femmes en résistance.  L’objectif est aussi de proposer un espace réservé à des films de femmes, car c’est plus dur pour les femmes de faire des films et en particulier d’avoir accès à des financements. C’est également plus dur d’être distribuées. Le festival est un espace où l’on présente des films qui ne seraient pas forcément montrés ailleurs, bien qu’ils le devraient ! Ce sont aussi des films de qualité : nous sommes exigeantes sur la forme.

Il est  difficile de dire si en 15 ans la réalisation « au féminin » a changé car beaucoup de choses ont évolué : les supports notamment. Beaucoup de femmes, partout dans le monde, font des films et partout dans le monde, elles ont du mal à avoir accès aux canaux de distribution et aux financements.

Je pense que le féminisme a changé en 15 ans. Il y a des choses qui sont un peu plus visibles, un peu plus médiatique, mais je ne pense pas que ce soit plus facile de faire un film.

 

Quels sont les objectifs du festival ? Quel est le thème du festival de cette année, qu’avez-vous souhaité mettre en lumière ?  

Depuis 15 ans, les objectifs du festival sont de passer un temps de convivialité où l’on montre des films faits par des femmes en résistance. Ces  films sont différents de ce que l’on voit à la TV, car ils montrent des femmes résistantes et  non en train de subir. Nous constatons que, quelle que soit la teneur des difficultés, les femmes se battent, résistent, créent. Cela n’est pas suffisamment mis en valeur et nous voulons rattraper ce manque.

Le thème cette année est : « Résistance à la modestie « . Pourquoi ? Beaucoup de thèmes féministes « classiques » ont déjà été passés en revue : femmes en résistance à l’enfermement, à l’invisibilité, au silence, à l’obscurantisme, à la guerre etc. C’était un peu un clin d’oeil pour dire aussi : nous avons montré tellement de femmes, en 15 ans, qui font tellement de choses formidables. On se rend compte souvent qu’elles sont astreintes à la modestie, qu’elles ne doivent pas faire trop de vagues. On les oublie alors trop facilement. Nous nous sommes dit « ça suffit d’être modestes !  Montrons les faisant des choses formidables et amusons nous un petit peu aussi !!  »

 

Qu’apportent pour vous les documentaires à la lutte pour les droits des femmes ?

Globalement il faut moins d’argent pour faire un film documentaire qu’une fiction. C’est donc le format le plus accessible pour les femmes pour rendre compte de ce qu’elles vivent.

Le documentaire permet vraiment aux personnes concernées de pouvoir s’exprimer. Le documentaire est subjectif, ce qui compte est le point de vue de la personne derrière la caméra. C’est ce qui différencie le documentaire du reportage, qui n’est pas censé prendre parti et montrer tous les points de vues, mais si l’objectivité n’existe pas.

Dans le documentaire, il y a un engagement qui est revendiqué.

 

En quoi est-ce important de présenter des films internationaux ?

Pour nous, il est indispensable que le festival soit le plus international possible. Nous souhaitons montrer des femmes en résistance à travers le monde, montrer qu’il y a partout des femmes, quel que soit leur degré de liberté, leur accessibilité au financement, qui s’emparent de la caméra et qui font des choses formidables, que ce soit en Chine, en Inde, au Mexique, en Colombie, en Afrique etc.

Cette année, nous présentons un film sur une jeune lesbienne camerounaise, un film qui se déroule au Burkina Faso. Nous proposons également un film sur les femmes rurales en mouvement du Nordeste brésilien. Un film où les femmes qui racontent leurs luttes au sein de ce mouvement nous ont vraiment enthousiasmées …

Contrairement à la TV, nous ne voulons pas seulement donner à voir des femmes qui subissent les horreurs du monde. Bien sûr, il y a des films qui sont parfois très durs, mais on sent souvent à travers les films une force et un enthousiasme dans la lutte collective, qui sont communicatifs.

 

Voulez vous parler d’un film en particulier ? 

La programmation du festival est très riche, c’est difficile de choisir. Le samedi soir, nous allons présenter en première française, Et si le ciel était vide de Thissa D’Avila Bensalah qui est un film qui nous a vraiment enthousiasmées. Le sujet est difficile. Il s’agit des violences patriarcales et psychiatriques et le lien entre ces deux types de violences dans l’institution. C’est un film profondément féministe et enthousiasmant.  C’est un très beau film et j’espère que beaucoup de monde viendra.

 

Propos recueillis par Salome 50-50 magazine

 

Le programme

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