Articles récents \ Culture \ Livres Nataly Breda : Souffles coupés

Nataly Breda est une ancienne journaliste, elle a co-dirigé la collection Egale à égal (Laboratoire de l’égalité/éditions Belin). Elle a créé la branche toulousaine d’Osez le féminisme ! et vient d’écrire Souffles coupés, son premier roman qu’elle définit comme féministe. S’y mêlent avec force passion, érotisme et fin de vie… 

Est-ce que vous définissez Souffles coupés comme un roman féministe ? 

Oui. Bien sûr, j’aurais pu écrire un roman sur des féministes ou un essai, mais ce n’était pas mon idée. Mon idée était que le roman soit lui-même un objet féministe, en ce sens que le texte lui même, va interroger les femmes sur un certains nombre de valeurs. Le fait que les lectrices/lecteurs ne le « sentent » pas, cela ne veut pas dire qu’il n’est pas féministe. En revanche, on a une histoire d’amour entre deux personnages dont l’héroïne est féministe ! Le terme est lancé ! 

Le fait que le personnage principal soit féministe, simplement est, pour moi, une démarche féministe. Il est important pour moi que les femmes qui ne se disent pas féministes justement, voient qu’elles peuvent avoir une liberté, dans leur vie, dans leurs relations avec les hommes. Dire aux femmes « vous pouvez être libres« , c’est en ce sens que je dis que c’est un roman féministe. Je voulais inverser les stéréotypes de genre, c’est la femme qui va amener l’homme sur son terrain et c’est très très rare dans la littérature. 

Dans votre roman, il y a une approche forte sur la fin de vie, un regard particulier sur la maladie, sur le handicap. Pourquoi avez vous eu envie de parler de cette question ? 

J’ai cette sensibilité depuis toujours, sans doute parce que mes parents étaient dans le milieu médical. Je trouvais interessant d’écrire une histoire d’amour entre deux personnes qui ont deux pathologies graves, qui, au final, les rapprochent. 

Il s’agissait également d’approcher la maladie et le handicap d’un point de vue positif. 

Et je souhaitais parler de personnes un peu moins glamour, que celles que l’on trouve aujourd’hui dans les romans d’amour. La « romance » évoque beaucoup les questions de sexualité mais souvent, les personnages mis en scène sont toujours très heureux et en bonne santé. Souffles coupés propose des protagonistes différents.

La fin de vie, en effet est une question qui est en filigrane dans le roman. Quand on a des pathologie graves, on est amené à s’interroger plus facilement que d’autres. Ainsi, il est important de savoir si un jour je suis très malade, si un jour je n’ai plus la possibilité de faire part de ma volonté ou si mon état de santé dégénère, ce que je peux faire, ce que la loi me permet, dans quelle mesure la société a un regard sur ma position de malade ? 

Et voilà c’est pourquoi j’ai souhaité remettre 50 centimes pour chaque exemplaire vendu à l’Association Pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD). 

L’ ADMD, est une association formidable qui concerne aussi les plus jeunes ! Lorsque l’on vieillit c’est plus évident, on se questionne plus sur sa mort. Lorsque l’on est jeune, c’est différent. Personnellement, avant 25/30 ans je ne m’était pas questionnée sur cette question. C’est bien de sensibiliser les jeunes. 

 Est-ce qu’il n’y a pas plus de femmes dans l ADMD ? Ou c’est 50/50 ? 

Les femmes vivent plus longtemps et elles sont plus aidantes. Elles s’occupent majoritairement des personnes dépendantes et en fin de vie. 

Donc évidemment, il y a là aussi un angle féministe majeur. Ce sont souvent les femmes qui s’occupent de leurs parents qui vont mal, quand il y a une personne handicapée dans la famille, ce sont les femmes qui la prennent en charge. 

D’ailleurs je dédie mon livre à toutes les femmes et ce n’est pas pour rien. Parce que je pense vraiment que Souffles coupés est un livre de femme ! 

Cela reste quand même avant tout une grande histoire d’amour, une forte histoire d’amour ce livre ? 

Des journalistes m’ont dit  » vous avez un érotique fort « , leur perception est que l’histoire d’amour est propice voire prétexte à l’érotisme. Ici, c’est absolument l’inverse. J’ai souhaité écrire une histoire d’amour et je ne voyais pas comment l’écrire sans scènes érotiques. Bien entendu, il existe des personnes qui sont dans des relations platoniques, des personnes asexuelles, qui considèrent que le sexe ne fait pas partie de leur histoire d’amour, je peux le comprendre… Donc j’ai voulu écrire cette histoire d’amour là avec l’érotisme qui la construit. Peu de femmes sont allées sur ce terrain là, parce que c’était le prè carré des hommes . Je pense à Arthur Miller évidement, à Sade également…  

En tant que femme qui écrit, je voulais reprendre ça, me placer du côté des femmes. Je suis consciente de l’hétéro normativité de cette histoire, des références  patriarcales qui y sont présentes

J’ai essayé peu à peu d’amener ma pierre sur cette question là, c’est à dire l’érotisme …

Propos recueillis par Caroline Flepp 50-50 magazine

 Nataly Breda : Souffles coupés . Ed French Pulp. Collection grands romans – 2017

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