Articles récents \ Culture \ Livres Les Parleuses : «Nous espérons via cette requête faire retentir le fait qu’une librairie est un lieu de culture particulier et que sa liberté d’expression doit être respectée»

Les Parleuses empêchées de parler, un comble… À ce jour, nul ne sait qui de la Ville de Nice ou de la police nationale a donné l’ordre de censurer les slogans affichés à l’intérieur et à l’extérieur de la Librairie, Les Parleuses, à Nice lors de la visite du ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin.  Peu avant la présence du ministre, des policiers municipaux ont arraché les affiches réalisées par le collectif, Les Colleuses niçoise.es, fixées à l’extérieur des vitrines et pour celles qui étaient à l’intérieur, un panneau en bois revêtu d’un drap noir a été apposé devant afin de cacher des messages militants : Violeurs on vous voit, victimes on vous croit, Qui sème l’impunité récolte la colère, Sophie, on te croit. Puis des CRS se sont postés devant la librairie le temps du discours du ministre. Stupeur et colère des gérantes de la librairie tout comme du collectif, Les colleuses et de la population niçoise devant cette censure et abus de pouvoir de la part des autorités.

Anouk Aubert et Maud Pouyé estimez-vous que la Ville de Nice ait outrepassé ses droits en intervenant pour arracher les affiches collées à l’extérieur de votre librairie et cacher celles posées à l’intérieur afin de ne pas incommoder G.Darmanin ?

Nous ne savons absolument pas d’où vient l’ordre de « bâchage ». Ce dont nous sommes sûres c’est que nous n’avons manifestement pas été en infraction puisque nous n’avons pas été verbalisées.

Ce drap noir posé par les forces de police sur les affiches du collectif les Colleuses, fait tristement écho au linceul des 124 femmes tuées depuis le début de l’année. Les CRS ont religieusement surveillé ce panneau recouvert de ce drap afin que les affiches féministes ne soient pas lues lors de la visite de G. Darmanin.

Cette censure ne vous incite-t-elle pas à dénoncer encore davantage l’entre-soi masculin dans le monde de la politique à travers vos futurs événements littéraires ?

Notre librairie, dans les choix littéraires et d’essais que nous faisons, est positionnée d’une manière particulière et engagée. Les violences faites aux femmes et aux minorités nous tiennent à cœur et nous essayons quotidiennement de mettre à l’honneur les femmes dans la littérature. Ces collages intervenaient et avaient du sens après la venue d’Hélène Devynck (1) à la librairie le mardi précédent et dont le livre, Impunité, relate parfaitement bien les mécanismes d’un boys’club puissant.

Vous avez déposé une requête auprès du Tribunal de Grande Instance pour entrave à la liberté d’expression et à liberté de commerce, un recours qui vise le ministère de l’Intérieur et la ville de Nice.

Notre avocate, Lorraine Questiaux, a déposé une requête auprès du Tribunal administratif afin de faire annuler la décision. Nous espérons via cette requête faire retentir le fait qu’une librairie est un lieu de culture particulier et que sa liberté d’expression doit être respectée. Par ailleurs, nous espérons que cette requête fera entendre aux pouvoir publics que les forces de police ont des missions qui ne relèvent pas du bâchage de librairies.

Propos recueillis par Laurence Dionigi 50-50 Magazine

1 Hélène Devynck journaliste, a traité de l’affaire PPDA dans son livre, Impunité, paru aux Ed.Seuil. Elle s’est associée aux gérantes de la librairie pour saisir la justice afin de faire reconnaître l’illégalité de cette censure

Librairie, Les Parleuses, 18 rue Defly Nice

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