Société Les lycéennes d’Ille-et-Vilaine veulent être respectées, même en jupe
Oser porter une jupe dans un établissement scolaire n’est pas toujours facile. Mais quand les jeunes eux-mêmes décident de lutter contre les préjugés liés à l’apparence, ils montrent qu’ils peuvent aller très loin.
L’histoire commence en 2006. L’association Liberté Couleurs assure une de ses interventions habituelles en milieu scolaire au lycée agricole d’Etrelles à 40 km de Rennes. Au programme : permettre à des lycéens de s’exprimer sur les questions de sexualité.
Très vite la conversation prend un tour inattendu ; les filles disent souffrir de l’attitude des garçons, du manque de respect qu’ils leur manifestent. Elles avouent : porter une jupe au lycée, ce n’est pas simple. Celles qui ont tenté l’expérience ont subi des moqueries et sont passées pour des filles « faciles ».
Les garçons s’étonnent de leurs propos. Jamais ils n’avaient pensé que leur attitude, plus maladroite qu’agressive, pouvait être blessante.
Le dialogue s’engage ; il durera toute la séance et bien au-delà. Lors de la visite suivante, l’animateur de l’association a la surprise de voir que toutes les filles sont en jupes. Les garçons ont promis de se comporter avec respect.
L’idée fait tache d’huile
Pourquoi le défi relevé par cette classe ne pourrait-il pas l’être par d’autres ? Très vite, l’idée, reprise par l’association, fait des adeptes dans le lycée d’Etrelles d’abord, puis dans d’autres établissements du département.
Aujourd’hui, les jeunes d’Ille-et-Vilaine s’apprêtent à vivre leur 5e Printemps de la jupe et du respect. Du 21 mars au 8 avril, les animations vont se succéder dans les établissements secondaires et autres lieux d’accueil des jeunes.
Des initiatives individuelles ou collectives voient désormais le jour chaque année ; des jeunes s’impliquent dans la création de supports d’expression (roman-photos, vidéos, expositions, spectacles, etc.), organisent des débats, visionnent des films…
Depuis 2009, de nombreuses structures de toute la Bretagne ont emboîté le pas de cette mobilisation pour lutter contre les stéréotypes et les préjugés et sensibiliser aux conséquences de comportements à caractère sexiste. D’autres régions (Rhône-Alpes notamment) proposent aussi désormais quelques rendez-vous.
Les enseignants le disent, le Printemps de la jupe, connu désormais sous le diminutif PJR, laisse des traces chez les jeunes qui y participent. Des attitudes plus positives sont constatées dans les groupes ; individuellement, les jeunes participants prennent de l’assurance et apprennent à exprimer ce qu’ils ressentent. Non seulement les jeunes sont invités à changer leurs représentations voire leurs comportements mais ils ont l’opportunité de créer des outils qui seront ensuite utilisés par d’autres groupes. Une belle reconnaissance de leur travail.
Geneviève Roy – EGALITE
Voir le programme de l’édition 2011
Pour aller plus loin :
Lors des premiers échanges au lycée d’Etrelles, la documentariste Brigitte Chevet tournait des images destinées à présenter le travail de l’association Liberté Couleurs. L’idée des jeunes l’a séduite. Elle a décidé d’en faire un film de 52 mn. Son titre : Jupe ou pantalon.
Un dilemme pour les filles d’aujourd’hui dont les mères ou les grands-mères se sont battues pour porter des pantalons !
A lire : Ce que soulève la jupe, de Christine Bard, éditions Autrement (2010) suivi de Une histoire politique du pantalon, toujours de Christine Bard, aux éditions du Seuil (2010)
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