Brèves Ordonnance de protection : Les femmes responsables de leur propre protection ?

Un décret passé inaperçu le 27 mai 2020 pourrait bien compliquer grandement les choses pour les femmes en grand danger demandant une ordonnance de protection. Les associations (Fédération Nationale Solidarité Femmes, Fondation des Femmes, FIT-Une Femme Un Toit, La Maison des Femmes de Saint Denis, et Le Planning Familial) alertent l’opinion sur ce texte et espèrent que les débats au Sénat sur la proposition de loi visant à protéger les victimes de violences conjugales (portée par Mme la Députée Bérangère Couillard) ce mardi pourront remédier à cette situation incongrue et dangereuse.

Selon ce nouveau décret, la victime en demande de protection n’a plus que 24h pour convoquer son agresseur par huissier à l’audience. Le délai entre la décision du juge de fixer l’audience et l’audience étant au total de 6 jours, l’agresseur aurait alors 5 jours pour préparer sa défense avant l’audience.

Pour ce faire, concrètement, les victimes doivent passer par des huissiers de justice pour notifier la date, ce qui est coûteux et aléatoire car le recours à un auxiliaire de justice dans un délai si court peut être impossible, même si elles passent par un avocat et qu’elles aient l’aide juridictionnelle. Il est difficile de trouver en une demie-journée un huissier qui pourra procéder à l’assignation le jour même. Encore plus si c’est au titre de l’aide juridictionnelle.

Si elles échouent à le faire, toute la procédure est caduque et doit être à recommencer à nouveau, ce qui implique du temps et des moyens supplémentaires, alors même qu’elles sont en grand danger.

Cette nouvelle règle paraît ainsi aller à rebours de l’esprit de la réforme initiale instaurée par la loi Pradié du 28 décembre 2019. La loi instaurait un délai bienvenu de 6 jours entre la décision et la tenue des audiences d’ordonnance de protection de sorte à permettre la mise sous protection des femmes victimes de violences soit réalisée plus rapidement, et plus efficacement.

La règle instaurée par le décret vient au contraire les placer dans une situation d’incertitude et d’exposition au danger. Il est fort à craindre que les parties défenderesses ne manqueront pas de s’en saisir pour permettre l’annulation des procédures. L’article L136-3 du code de la procédure civile, prévoit que la convocation peut être faite également par le greffe ou le parquet et pourtant en pratique, ce sont les victimes qui doivent assigner.

La Fondation des Femmes et les associations proposent que les femmes puissent systématiquement demander au Greffe de faire convoquer les défendeurs, afin qu’elles ne soient pas responsables de leur propre protection. Elles demandent en tout cas et en urgence la suppression de ce nouveau délai qui met les femmes en danger et rend les procédures impossibles à tenir.

Fédération Nationale Solidarité Femmes, Fondation des Femmes, FIT-Une Femme Un Toit, Maison des Femmes de Saint Denis, Planning Familial

 

 

 

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