Brèves Viol incestueux : Et on ose encore dire que nous ne savions pas !
La sortie du livre de Camille Kouchner La Familia Grande suscite une forte émotion.
Nous saluons le courage immense de cette femme ainsi que celui de son frère jumeau.
Mais la réaction de la société qui semble découvrir, comme sidérée, la réalité du viol incestueux ne peut que nous étonner. En 1985 et 1986 déjà, étaient publiés deux témoignages de victimes : De la honte à la colère de Viviane Clarac et Nicole Bonnin et le Viol du silence d’Eva Thomas.
En septembre 1986, les Dossiers de l’Écran, diffusés en prime time par la défunte Antenne 2, donnent la parole à Eva Thomas. Les répercussions sont très importantes, notamment le lendemain où les écoutantes du Collectif Féministe contre le Viol enregistrent un nombre d’appels record et apportent solidarité et réconfort à des centaines de victimes qui ont tu les crimes qu’elles ont subis parfois durant des décennies. Parce que personne ne voulait les entendre.
En 1988, le Collectif Féministe contre le Viol réalise un film intitulé : L’inceste, la conspiration des oreilles bouchées où quatre victimes témoignent. Ce film est vu à travers toute la France par nombre de travailleurs sociaux, police, gendarmerie, magistrature, médecins.
La répercussion est telle que la loi est modifiée (10 juillet 1989) rallongeant pour la première fois les délais de prescription à partir de la majorité pour les victimes. Et puis… plus rien ou presque. Le viol incestueux revient à la place qu’il n’aurait jamais du quitter pour certains qui ont du avoir chaud : le non-dit absolu…
Et pourtant si les oreilles et l’émotion étaient restées grandes ouvertes, elles auraient entendu : que ce type de viols se produisent dans toutes les classes sociales, que la solitude des victimes est immense, que les agresseurs font croire à ces victimes que « c’est normal », « tout le monde fait ça », que le chantage est à tous les étages « si tu le dis, ta mère va se suicider… », etc.
Mais la société patriarcale ne voulait pas entendre. Impossible de remettre en cause la famille, « havre de paix » et pilier de la société.
Les crimes sexistes ont perduré jusqu’au moment où un certain #MeToo vienne contraindre ceux qui ne voulaient rien savoir. De façon pérenne, cette fois, on l’espère… Mais il reste encore bien du travail à notre société pour que le viol incestueux soit révélé et effectivement poursuivi.