Articles récents \ Monde \ Europe ONU Femmes UK : « Nous apportons un soutien financier et psychologique aux femmes victimes de violences sexistes et sexuelles, vécues par 1 femme sur 4 »

L’Université de Warwick (Angleterre) accueille sur son campus depuis septembre 2019 une antenne d’ONU Femmes Royaume-Uni. Composée d’une dizaine d’étudiantes à Warwick, l’association se bat pour promouvoir l’égalité au sein du campus universitaire par le biais des campagnes lancées par l’ONU, mais aussi grâce à des événements et des partenariats avec d’autres associations étudiantes. Il est en effet primordial de promouvoir le combat pour l’égalité et contre le sexisme sur les campus et dans les universités. À la différence de la France, au Royaume-Uni, une partie des étudiant·es vit sur le campus, et l’université est un véritable lieu de vie pour toutes et tous. Les campus universitaires sont aujourd’hui des lieux où les violences sexistes et sexuelles sont commises régulièrement, d’où la nécessité d’associations étudiantes comme ONU Femmes pour sensibiliser les étudiant·es à l’égalité. Aisha Morales, présidente de l’association et Isadora Clough, chargée de campagne parlent de leur combat pour l’éducation à l’égalité femmes/hommes.

Quelles sont les campagnes récentes d’ONU Femmes UK ? 

Notre campagne phare de l’année 2020 a été la campagne “Draw a Line” (“tire un trait”). “Draw a Line” lutte contre les violences sexuelles et les mutilations génitales. C’est d’ailleurs dans le cadre de cette campagne que nous avons interviewé la gynécologue française Ghada Hatem, actuellement à la tête de la Maison des Femmes de St Denis. C’est une femme extrêmement inspirante qui rejoint complètement les actions de l’ONU pour “Draw a Line”. Sur le terrain, nous apportons un soutien financier et psychologique aux femmes victimes de violences sexistes et sexuelles., vécues par 1 femme sur 4 et selon l’ONU, il y a aujourd’hui 37 pays dans le monde qui ne poursuivent pas les violeurs si ces derniers épousent leur victime. L’année dernière, nous avons aussi participé à la campagne “trailblazers” (“pionnières”) dont le but était de célébrer les femmes militantes, savantes, etc . ayant eu un impact sur notre monde, comme par exemple Greta Thunberg ou Malala. En ce qui concerne nos actions à venir, nous commencerons au premier semestre 2021 la campagne “He for She” , un mouvement de solidarité internationale qui appelle au soutien des hommes et des garçons dans le combat que nous menons pour les droits des femmes et l’égalité. C’est une campagne qui a eu beaucoup d’écho pendant le confinement de mars, durant lequel l’ONU a lancé un “He for She at home” (“He for She à la maison”) pour dénoncer la charge mentale subie par les femmes et sensibiliser les hommes et les garçons à ce sujet. 

Selon vous, comment peut-on, en tant qu’étudiant·es, lutter contre les phénomènes de viols et harcèlements sexuels sur les campus universitaires ?

En dehors des actions fixes de l’ONU Femmes, nous organisons, en tant qu’association étudiante, beaucoup d’événements virtuels et sur le campus quand nous en avons l’occasion. Depuis le covid, nous avons beaucoup milité en ligne, notamment à travers nos réseaux sociaux. Par exemple pour “Draw a Line”, nous avons mis en ligne une cagnotte grâce à laquelle des dons ont été immédiatement reversés à ONU Femmes. Nous avons également fait un jeûne de 24h en soutien à cette campagne. Pour ce qui est de la lutte contre le harcèlement sexuel, nous avons organisé une conférence virtuelle avec Zoe Stromberg, une illustratrice anglaise qui dénonce le harcèlement sexuel dans l’espace public avec ses dessins qu’elle publie sur son compte Instagram (@cutecatcalls). Nous sommes également depuis peu membre de l’association “Warwick Women’s Summit”, dont le but est de promouvoir l’empowerment féminin ainsi que la sororité à travers le campus de Warwick. Prochainement, nous allons aussi fonder un mouvement étudiant, “People at Warwick” qui aura pour but de combattre les stéréotypes sexistes en mettant en place des règles simples d’égalité sur le campus. Ces règles seront accessibles à tous et permettront de mettre en place une logique de vivre-ensemble ainsi qu’une atmosphère bienveillante visant à favoriser l’épanouissement des étudiant·es. Nous ne sommes pas seules sur ce projet : nous collaborons avec d’autres associations ainsi qu’avec des professeur·es de notre université. 

Comment faire en sorte que les hommes se sentent également concernés par le combat pour l’égalité et les violences sexistes et sexuelles, comment leur faire prendre conscience qu’il ne s’agit pas que de problématiques touchant les femmes ? 

C’est justement un problème que nous rencontrons. Nous pensons que cela peut être en partie lié au fait que le mot “femmes” soit dans le nom de notre association, ce qui peut paraître d’emblée excluant pour les hommes de notre université. Pourtant, nous essayons d’inclure les hommes au maximum, mais il est vrai qu’il n’y a souvent que des femmes qui assistent à nos événements et qui soutiennent nos campagnes. C’est d’ailleurs le but de “He for She”. Il faut sensibiliser les hommes aux questions de genre et d’inégalités. C’est un combat qu’ils devraient aussi mener. On remarque bien, dans nos amis par exemple, qu’ils ne sont pas du tout éduqués à ces questions-là. Pourtant, quand on en parle avec eux et qu’on leur explique les violences et discriminations dont les femmes sont victimes, ils comprennent l’importance de notre combat et adhèrent complètement. En fait, à moins d’avoir une féministe militante dans leur entourage, il y a peu d’hommes qui prennent conscience du problème. C’est vraiment dommage et on essaye, en tant qu’association relevant de l’ONU, de les viser au maximum dès qu’on organise un événement. 

Il y a deux ans (2018), l’université de Warwick a connu un scandale lié à un groupe WhatsApp dans lequel plusieurs garçons de l’université menaçaient de violer et harceler sexuellement leurs camarades filles. Cette affaire avait été particulièrement mal gérée par la direction de l’université. Où en sommes-nous aujourd’hui?

C’est une affaire très importante dans l’histoire de l’université de Warwick. A l’époque, il y avait eu beaucoup d’articles de presse et la BBC a même fait un documentaire sur le scandale. En 2018, nous étions étudiantes en première année, et c’était particulièrement choquant de voir que de tels actes pouvaient se produire dans l’enceinte même de notre université, sans qu’on soit protégées ni prises en charge ou soutenues psychologiquement par la suite. C’est ce genre d’événements qui ont été déclencheur de l’envie de fonder une antenne de l’ONU Femmes sur le campus de Warwick. Aujourd’hui, les étudiant·es de première année ont pris connaissance de l’affaire et ont organisé plusieurs manifestations sur le campus. C’est un symbole fort, car on sait bien que ce genre de chose arrive dans toutes les universités. Des lettres ont été écrites au Président de Warwick ainsi qu’au syndicat étudiant pour leur reprocher leur manque d’empathie à l’égard des victimes, et surtout le manque de punitions conséquentes envers les coupables.

Propos recueillis par Victoria Lavelle 50-50 Magazine

 

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