Articles récents \ Culture \ Théâtre Marquise : une femme de théâtre à l’honneur

Avignon, le Off. Aime comme Marquise met en lumière la vie de Thérèse du Parc, dite Marquise, comédienne exceptionnelle qui a travaillé avec Molière, Corneille et Racine ; une pièce réjouissante et érudite.

Joli tour de force de Chloé Froget, femme de théâtre aux dons multiples. Elle incarne avec talent Thérèse Duparc jeune… Elle est aussi la metteuse en scène imaginative et la scénographe ingénieuse de la pièce, dont le texte en alexandrins et en prose, a été confié à Philippe Froget, son père. L’enthousiasme et la vitalité de Chloé Froget sont palpables sur scène : « C’est une chance folle. La chance de raconter l’histoire de ces hommes, plus illustres les uns que les autres, qui ont forgé l’Histoire de France, de notre patrimoine littéraire et de notre héritage culturel. La chance de raconter cette histoire à travers les yeux… d’une femme, et quelle femme ! », s ‘émerveille Chloé Froget. La pièce se déroule à deux époques et sur deux niveaux différents : sur une estrade, en hauteur, on assiste à un interrogatoire de police, dans la loge de théâtre de Thérèse du Parc, à Paris en 1668, alors qu’elle se prépare à jouer Andromaque de Racine. Le lieutenant général de la police mène l’enquête pour savoir si Molière est réellement l’auteur des textes qu’il signe.

En contrebas, sur les planches, une série de flashes-back revient sur le passé de Thérèse du Parc, fille du peuple qui parvient à se faire embaucher dans la troupe de Molière… C’est grâce à elle que Corneille accepte que ses pièces soient jouées par la troupe de Molière… en abandonnant les accents grandiloquents alors de mise, avec roulement des « rrrr » et hyper-articulation emphatique. On retrouve Marquise à la cour du roi, rencontrant d’Artagnan. Puis lorsqu’elle joue pour Racine, remarquable comédienne qui donnera ses premiers succès au jeune auteur.

Une pièce qui a tout juste

L’histoire est palpitante, joyeuse, captivante. Les comédien.ne.s – Chloé Froget, Aurélie Noblesse, Christophe Charrier, Xavier Girard, sont excellent.e.s, aussi précis.e.s dans la diction que dans l’expression ou la gestuelle. On s’étonne, au moment du salut, qu’ils ne soient que quatre, tant ils endossent de rôles différents, avec une si belle facilité. Les décors, imaginés par Chloé Froget aussi, simples et ingénieux, réservent bien des surprises. Tout dans la pièce regorge d’inventions et de trouvailles. C’est une véritable leçon d’histoire de la littérature du 17 e siècle, donnée sans aucune pédanterie, et écrite dans une langue à la fois riche et abordable. Un pan entier de l’histoire de la littérature s’éclaire. Les citations, justement dosées, sont parfaitement choisies et intégrées. On passe, presque sans s’en apercevoir, de la prose aux vers, notamment dans la bouche des hommes de lettre, Corneille, Molière, Racine, mais aussi dans celle de Marquise qui prend de l’assurance au fil de sa vie. Aime comme Marquise sera en tournée lors de la prochaine saison : si vous l’avez ratée en Avignon, ne manquez pas de faire connaissance avec cette femme extraordinaire quand elle passera dans votre ville.

Sylvie Debras 50-50 Magazine

A voir à l’Espace Roseau-Teinturiers dans le Off, à 10 h jusqu’au 31 juillet

Photo de Une : Jean-Bernard Vincens

print