Articles récents \ Culture \ Théâtre Je ne cours pas, je vole : sur le podium !

Elodie Menant, autrice, et Johanna Boyé, metteuse en scène, collaborent à nouveau et livrent une pièce époustouflante. Je ne cours pas, je vole ! est une pièce performance pour six comédien.nes, dont Vanessa Cailhol incarnant la coureuse Julie Linard, qui recréent avec maestria le milieu du sport de haut niveau. Trio gagnant !

Que l’on s’intéresse au sport de haut niveau ou pas, on est  absolument captivé par cette pièce jouée par six comédien.nes aux talents multiples et aux capacités physiques hors normes. L’histoire est palpitante : depuis 12 ans, Julie Linard, coureuse de 800 mètres, s’entraîne pour les jeux olympiques ; remportera-t-elle la médaille d’or ? On retient son souffle. En attendant la course, on rencontre les nombreuses personnes qui gravitent autour de la jeune sportive.

Sa famille est assez ambiguë, mère, père et frère, à la fois uni·es et antagonistes, qui veulent la voir gagner mais qui sont inquiet·es de la voir s’écrouler. Ses entraîneurs, d’abord son père puis un coach sportif, valent leur pesant de cacahuètes ! On croise aussi d’autres sportives/sportifs de haut niveau, dont deux coureurs africains, drôles et émouvants, une gymnaste russe, douée et pathétique, une nageuse française, bougonne et truculente, un tennisman espagnol délicieusement croqué. Bien sûr, les médias sont de la partie. Le public se tord de rire devant le duo de chroniqueurs dans leur numéro bien rodé. Chacun des personnages est parfaitement campé, attachant. Et chacun·e des comédien·nes mérite d’être salué·e : Vanessa Cailhol qui s’envole sur scène, Olivier Dote Doevi, Axel Mandron, Youna Noiret, Laurent Paolini… sans oublier l’autrice, Elodie Menant elle-même, qui interprète une savoureuse Laure Manaudou s’ennuyant tellement en nageant qu’elle compte les carreaux de la piscine !

Une pièce qui a du souffle

On aime la détermination de ces athlètes qui veulent sans cesse dépasser leurs propres limites. Qui se donnent à fond et même plus. Bien sûr, la pièce leur rend hommage (ne vaudrait-il pas mieux écrire femmage ?) Mais l’autrice a su aussi pointer la folie de ce milieu sportif : les abus sexuels qui cassent les sportives, l’argent qui pourrit les compétitions, le système prostitueur qui se greffe sur les manifestations sportives… et surtout, l’entraînement à outrance qui détruit les corps, provoque aménorrhées, fractures et craquages, mentalement comme physiquement. 

A aucun moment, la pièce ne s’essouffle. La mise en scène de Johanna Boyé, tirée au cordeau, est particulièrement efficace… et exigeante pour les comédien.nes qui donnent l’image d’une belle complicité. Les parties chorégraphiées sont remarquables. Tout se joue à la seconde, au millimètre. Dans un décor minimaliste, de très belles images, parfaitement mises en lumière, se succèdent. C’est du grand art. Les spectatrices/spectateurs sortent soufflé.es, époustouflé.es par cette pièce de haut vol. Il faut suivre de près les créations de l’autrice Elodie Menant et de la metteuse en scène Johanna Boyé. Leur précédente collaboration, Est-ce que j’ai une gueule d’Arletty, a obtenu deux Molières en 2020. Combien Je ne cours pas, je vole ! en obtiendra-t-elle ? La pièce est dans les starting-blocks. Les paris sont ouverts. 

Sylvie Debras 50-50 Magazine

A voir au Théâtre du Roi René dans le Off, à 15 h 20 jusqu’au 31 juillet.

print