Brèves Réaction à l’émission de France 2 un si long silence: un certain écœurement
Le 10 mai, il était question de Sarah Abitbol, patineuse de haut niveau, victime de harcèlement et de viol depuis l’âge de 15 ans et de son témoignage dans son livre Un si long silence.
Une bonne nouvelle paraît il, cela a déclenché une avalanche d’autres déclarations de victimes. Bien sûr c’est tant mieux si d’autres ont osé parler mais ne faudrait il pas d’abord convenir que c’est une horreur, une de plus, dans le registre des violences faites aux femmes ?
Alors que l’on évoque les viols et agressions dans le sport suite au livre de Sarah Abitbol agressée et violée par son entraîneur pendant des années, c’est l’ampleur du phénomène que l’on dénonce, on le savait déjà pourtant. Ce serait une évolution que l’on puisse faire des enquêtes sur la chose, ha oui ? Des enquêtes ? Compter les violées comme on compte les féminicides ? Quel progrès !
Et ce sont les mecs qui en parlent, cinq sur le plateau qui donnent le cadre et font le mansplaining sur le contexte. Il y a seulement trois femmes présentes sur le plateau dont la victime, Sarah Abibol, et sa co-écrivaine, Emmanuelle Anizon.
On ne parle pas des violences masculines, pas des violences des entraîneurs tous des hommes. On dit aux victimes comment se protéger ! On demande aux parents de faire plus attention aux éventuels signes de mal-être chez leurs enfants comme si c’était à eux de changer le fonctionnement des fédérations protégeant habituellement les agresseurs sous couvert qu’ils seraient de bons entraîneurs.
Sarah Abitbol répète à l’envi qu’elle est devenue plus forte grâce à cette épreuve et qu’elle est contente d’avoir amené les autres à parler ! Bravo, en effet pour cette résilience. Mais répéter pendant toute l’émission que la parole doit se libérer est un peu court. La mise en place d’un système de prévention strict et encadré est à peine abordé.
On dirait que le sujet : c’est comment la victime doit parler, mettre des mots sur les horreurs subies et autre sujet : rendre les parents vaguement responsables s’ils ne détectent pas le malaise chez leur enfant ! Le présentateur a même l’audace de demander si Sarah en avait voulu à ses parents !
Apparemment, on ne veut pas parler de la racine du problème, on tourne autour du pot des violences et de la responsabilité masculine … Pas une fois le profil des agresseurs et de ceux qui les protègent est abordé. La prévention, l’éducation des hommes, on n’en parle pas.
On parle à peine de l’évolution des règles pour les éducateurs et enfin des obligations de contrôler le casier judiciaire des bénévoles et d’accepter pour les fédérations sportives des enquêtes sporadiques des bonnes pratiques.
Au moment, où on parle de justice le présentateur parle de déni de la part de la société !! Se rend-il compte de son propre déni ?
On voit bien qu’il y avait et il y a encore quasi permis d’agresser, puisque les fédérations et la justice n’agissent pas suffisamment, ne mettent pas en place de vraies logistiques de prévention.
Enfin, une femme, la seule qui dit des choses sensées, la ministre des Sports, Roxana Maracineanu, dit qu’il faut dénoncer le système, ouf ! Un homme dit qu’il y a « dysfonctionnement » comme si c’était juste un plomb qui avait pété. La victime doit encore se justifier ! Pour beaucoup, l’image du sport est donc entre les mains d’une jeune femme agressée qui aurait dû rester dans l’ombre. On l’accuse même d’avoir « sali » l’image du patinage ! Roxana Maracineanu, fait remarquer que les entraîneurs sont quasi tous des hommes et qu’il faudrait féminiser l’encadrement des sports, et avoir des entraîneuses à parité.
Faut-il en rire ou en pleurer ? Uu enfin regarder les violences masculines pour ce qu’elle sont : un fléau quotidien, et que seule la prévention, l’éducation, la surveillance, l’introduction des femmes dans les fonctions d’encadrement pourraient faire une différence !
Roselyne Segalen 50-50 Magazine