Brèves Nous répondons à Sean Baker : CANNES EST EN FRANCE !

Nous, responsables d’associations abolitionnistes de la prostitution, réagissons au discours de Sean Baker, réalisateur de Anora, quand il a reçu, le 25 mai 2024, la Palme d’or pour ce film.

Il a dédié cette récompense « à toutes les travailleuses du sexe passées, actuelles et à venir ».
Nous partageons son souci de rendre hommage aux personnes qui sont dans la prostitution, trop souvent oubliées, et de leur témoigner notre solidarité. 

Toutefois, nous sommes en désaccord avec l’expression « travailleuses du sexe » qui normalise l’enfermement de femmes dans la violence d’un système planétaire d’exploitation sexuelle.

Aux États-Unis, d’où vient Sean Baker, l’expression sex workers est courante, et on l’emploie sans avoir conscience qu’il s’agit aussi du langage des proxénètes.
Mais Cannes est en France. Dans le pays où Sean Baker a prononcé son discours, la loi Olivier-Coutelle de 2016 fait une tout autre analyse du système prostitueur : elle considère que les personnes prostituées ne sont pas des « travailleuses », mais des victimes de violences ; elle leur propose un accompagnement pour sortir de la prostitution si elles le désirent ; elle prévoit des campagnes de prévention pour les mineur·es ; enfin, elle innove en mettant l’accent sur la responsabilité centrale  des hommes qui paient pour un acte sexuel et sont passibles d’une contravention, comme en Suède et dans des pays de plus en plus nombreux.

C’est l’argent de ces clients-prostitueurs qui enrichit les proxénètes et les trafiquants. C’est pour satisfaire leurs exigences que ces derniers gèrent des réseaux internationaux et esclavagisent des êtres humains.

Être solidaire avec les personnes en situation de prostitution, c’est refuser le cliché du « conte de fées », expression employée dans la presse à propos du film. Ce n’est pas imaginer qu’il y en ait « à venir », car ce serait la pérennisation d’un système qui violente et détruit des millions de personnes à travers le monde, en majorité des femmes et des filles parmi les plus marginalisées.

Pour entendre la réalité des violences qu’elles ont subies, vous pouvez écouter des survivantes qui témoignent dans La vie en rouge , podcast qu’elles ont conçu et réalisé. 

Les 17 associations cosignataires : Amicale du Nid, Chiennes de garde, Conseil  National des Femmes Françaises, Élu/es contre les violences faites aux femmes, Encore féministes !, Fédération Nationale des Centres d’Information sur les Droits des Femmes et des Familles, Femmes du Monde et Réciproquement, Femmes pour le Dire, Femmes pour Agir, Fondation Scelles, Initiative Féministe Euromed, Maison des femmes de Paris, Mémoire Trauma et Victimologie, Regards de femmes, Réseau Féministe « Ruptures », Réussir l’égalité Femmes-Hommes, SCALE-UP, Zéromacho.

 

 

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