Articles récents \ Monde Les droits des femmes, de la Conférence de Pékin en 1995 à aujourd’hui en 2025

L’année 2025 marque les trente ans de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing, adoptés lors de la Conférence mondiale sur les femmes de l’Organisation des Nations Unies (ONU) en 1995. C’est un anniversaire important pour les droits des femmes dans le monde. Selon ONU femmes, ils constituent « le plan le plus complet et le plus visionnaire jamais créé pour parvenir à l’égalité des droits pour toutes les femmes et les filles ».

Ce n’est probablement pas ce qu’on appelle un sujet « grand public », mais c’est un enjeu majeur pour la moitié de l’humanité et pour la société tout entière. C’est en tout cas l’occasion de faire un point sur l’évolution des droits des femmes sur notre planète bleue, rougie ces dernières années par la prolifération des conflits sanglants, le record historique du montant global des budgets de défense, tous Etats confondus, et l’augmentation du nombre de morts violentes, en zone de guerre ou en temps de paix.

Chine, septembre 1995. Des centaines d’Etats membres des Nations Unies et d’organisations non gouvernementales (ONG), des milliers de délégué.es de gouvernements et d’institutions, des milliers de femmes et d’hommes – des femmes essentiellement – de la société civile internationale, des expert.es, des militant.es, au total 17 000 personnes, se pressent à Pékin (on dit Beijing aujourd’hui), pour la quatrième Conférence mondiale sur les femmes organisée par l’ONU. Cet évènement hors normes allait marquer un tournant dans l’histoire des droits des femmes et donner naissance à la Déclaration et la Plateforme d’Action de Pékin, adoptée par un consensus mondial des 189 Etats formant les Nations Unies. Elle produira un cadre global pour promouvoir l’égalité des sexes et l’émancipation des femmes et des filles au niveau international, décliné en douze domaines critiques, considérés comme les obstacles fondamentaux à l’autonomisation des femmes et à leur accès à l’égalité réelle avec les hommes.

Pour mémoire, les douze points de vigilance cruciale sont la pauvreté, l’éducation et la formation des femmes, la santé, les violences contre les femmes, la condition des femmes dans les conflits armés, l’économie, le pouvoir et la prise de décision, les mécanismes institutionnels, les droits humains des femmes, les media, l’environnement, et enfin les petites filles.

L’idée est que si les Etats s’attaquent frontalement à ces obstacles, alors l’égalité entre les femmes et les hommes deviendra une réalité. L’objectif de la plateforme est d’une part de fournir un cadre d’action international, qui guide les politiques en faveur de l’égalité, et d’autre part, de montrer la nécessité d’intégrer les droits des femmes dans l’ensemble de la vie économique, sociale et politique, pour une société plus juste et prospère. Chacun des 189 pays signataires s’est engagé à mettre en œuvre les objectifs de la plateforme dans ses législations et ses politiques nationales, et d’en rendre compte régulièrement, l’ONU étant chargé de soutenir les Etats dans l’application de leurs engagements et d’assurer l’organisation de l’évaluation par l’ensemble des pays tous les 5 ans.

De fait, en trente ans, on note des progrès considérables dans la lutte contre les violences sexistes et sexuelles, dans l’accès à la santé et à l’éducation, dans la participation politique et économique, dans les législations. Ainsi par exemple, on constate une meilleure protection juridique des femmes et des filles dans le monde avec aujourd’hui plus de 1583 lois contre les violences adoptées dans 193 pays contre seulement 12 pays en 1995. Et sur la question des femmes dans les conflits, les plans nationaux d’action, intitulés Femmes, Paix et Sécurité sont à présent 112 , contre 19 en 2010.

Mais on constate aussi des inégalités persistantes et, plus inquiétant, des reculs législatifs et « moraux » renforcés par l’impact délétère des crises mondiales et notamment la pandémie de COVID 19 dont on subit encore aujourd’hui et pour longtemps les conséquences.

Dans quelques semaines, le 10 mars prochain, s’ouvrira la 69ème session de la commission du statut des femmes (CSW 69) de l’ONU à New York comme chaque année à la même période. Elle sera précisément dédiée à la Déclaration et au programme d’action de Beijing. ONU femmes affirme : « De nos jours, une fille de quinze ans vivant dans le monde en développement a plus de chances que jamais. Par rapport aux générations précédentes, il y a moins de risques qu’elle vive dans une extrême pauvreté et il y a plus de chance qu’elle puisse grandir en bonne santé et bien nourrie. Le taux de mortalité maternelle a chuté de 38% entre 2000 et 2017 alors qu’il reste élevé dans certaines régions du monde. Au niveau mondial, cependant, les femmes âgées de 25 à 34 ans ont 25% plus de risques que les hommes de vivre dans une pauvreté extrême. Bien que le nombre d’enfants non scolarisés dans le primaire et le secondaire ait presque été divisé par deux depuis 1995, 32 millions de filles en âge d’aller à l’école primaire ne fréquentent toujours pas l’école. Le taux de mariages d’enfants est passé d’un sur quatre à un sur cinq, mais 650 millions de femmes vivant dans le monde aujourd’hui se sont mariées avant leur dix-huit ans. La politique reste un domaine principalement masculin, les trois-quarts des sièges parlementaires étant occupés par des hommes ».

Il reste encore beaucoup à faire. Mais, malgré le backlash qui est dénoncé à juste titre et la vigilance qu’il nous faut garder, les droits des femmes avancent envers et contre tout.

Jocelyne Adriant-Mebtoul 50-50 Magazine

50-50 Magazine sera à la CSW 69 pour cette édition spécialement dévolue à la conférence de Pékin et rendra compte dans ces colonnes du bilan établi à l’ONU sur l’évolution des droits des femmes, de la Conférence de Beijing jusqu’à aujourd’hui.

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