Brèves Alerte chez les pompiers : l’urgence de former les secouristes aux violences sexistes

Sensibiliser les secouristes : un impératif de santé et de sécurité

Le 7 avril, au Fort de la Briche à Saint-Denis, la brigade des sapeurs-pompiers de Paris (BSPP) a accueilli les docteures Ghada Hatem et Caroline Werkoff dans le cadre de la formation de maintien des acquis des chefs d’agrès du 1er groupement d’incendie et de secours. Une intervention essentielle, consacrée à la prise en charge des femmes victimes de violences.

Car si l’imaginaire collectif associe les pompiers aux incendies, la réalité du terrain est tout autre : 86 % de leurs interventions concernent les secours et soins d’urgence aux personnes — contre seulement 6 % pour les interventions pour départ de feu. Les pompiers sont alors les premiers interlocuteurs de nombreuses victimes, notamment celles de violences conjugales ou sexuelles.

Un besoin de formation spécifique

Intervenir auprès d’une femme victime de violences implique de comprendre ce qu’elle traverse. Les victimes peuvent être désorientées, présenter des « trous de mémoire », ou raconter les faits sans émotion apparente : ces manifestations sont des effets courants du stress post-traumatique. Leur comportement peut sembler incohérent mais il est en réalité l’expression de blessures profondes, physiques et psychiques, souvent associées à des sentiments de honte, de culpabilité ou de peur de ne pas être crue.

Les pompiers doivent également être formés à identifier les effets de l’emprise et à comprendre les liens qui unissent la victime à son agresseur, surtout lorsqu’il s’agit d’un conjoint ou ex-conjoint. Une tentative de départ suivie d’un retour ne traduit pas une hésitation ou une responsabilité partagée, mais bien les rouages d’un système de domination.

Le propre des violences systémiques est d’être inscrites dans un continuum enraciné de rapports de pouvoir. Enseigner ces logiques permet de déplacer le regard. Il ne s’agit plus de questionner la crédibilité ou les choix de la victime, mais de se centrer sur l’agresseur, sa stratégie de contrôle, et sur les moyens efficaces de soutenir la victime. 

Sauver des vies en repérant, écoutant et orientant les victimes

Grâce à cette formation, les professionnel·les apprennent à écouter sans juger, à adapter leurs mots, leur posture et à instaurer un cadre de confiance, premier levier pour permettre à une femme de sortir du silence.

Un questionnement systématique lors des interventions, dans un climat respectueux, confidentiel et bienveillant, peut permettre de détecter des violences invisibles. Le simple fait de poser la question « Subissez-vous des violences ? » peut déjà enclencher une prise de conscience chez la victime, et l’orienter vers les bonnes structures.

Protéger les victimes… et les intervenant·es

Se former, c’est aussi apprendre à se prémunir des dommages collatéraux lors des interventions. Être préparé·e, c’est limiter le risque de traumatisme vicariant, ce « traumatisme par ricochet » qui peut toucher celles et ceux qui écoutent, soutiennent et interviennent.

Une action à poursuivre

Chaque professionnel·le en contact avec des victimes doit être outillé·e pour répondre de manière juste, sécurisante et efficace à sa situation de danger. Former les pompiers, c’est élargir le premier cercle de protection. C’est aussi reconnaître que la lutte contre les violences sexistes commence dès le premier geste de secours.

Maison des Femmes de St Denis

 

 

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