Brèves 157 245 €: le coût de la séniorité pour les femmes.  Sortir de l’invisibilisation pour prévenir la précarisation

La Fondation des Femmes publie une nouvelle note de son Observatoire de l’émancipation économique des femmes, rédigée par Laetitia Vitaud, en partenariat avec la newsletter ViveS Média.  Lancé en 2022 avec le soutien du Crédit Municipal de Paris, l’Observatoire poursuit, avec cette sixième publication, son travail d’analyse des mécanismes d’appauvrissement spécifiques aux femmes tout au long de leur vie.

Une facture salée pour les femmes de 45 à 65 ans

À travers une analyse inédite des données de l’INSEE, cette note révèle un chiffre choc : entre 40 et 60 ans, une femme perd en moyenne 7 862 € par an, soit 157 245 € sur 20 ans. Un chiffre qui monte à 159 000 € dans le secteur privé. Ce manque à gagner est le fruit d’un double mécanisme : le sexisme et l’âgisme, qui se conjuguent pour exclure progressivement les femmes de la vie économique, au moment même où leurs compétences, leur expérience et leur disponibilité devraient être pleinement valorisées.

Des carrières hachées, des temps partiels subis, une invisibilisation croissante

Passée la quarantaine, les femmes subissent une accumulation d’obstacles structurels : carrières discontinues, métiers dévalorisés, surcharge de soins aux proches, temps partiels contraints, plafonds de verre renforcés. À cela s’ajoute une invisibilisation dans les médias, les entreprises et les politiques publiques. Résultat : 60% des personnes « ni en emploi, ni en retraite » sont des femmes, une zone grise où elles sont trop jeunes pour toucher leur pension, mais déjà exclues du marché du travail.

Une bombe sociale à désamorcer d’urgence

Avec des écarts de pension de retraite approchant les 40 %, des symptômes de ménopause ignorés en entreprise, des perspectives de reconversion ou de promotion limitées, les femmes de la mi-vie sont les grandes oubliées des politiques publiques. L’Observatoire alerte : sans action corrective ambitieuse, la précarité des femmes âgées va exploser dans les prochaines années. 

Anne-Cécile Mailfert, Présidente de la Fondation des Femmes « Devenir séniore ne devrait pas être synonyme de déclassement. Aujourd’hui, la société ignore ces femmes, pourtant piliers de la vie sociale, familiale, économique. Il est urgent de lever le tabou de l’âgisme au féminin et de construire une société dans laquelle on peut bien vieillir, y compris en tant que femme. »

Laëtitia Vitaud, autrice de la note « Au travail et dans le portefeuille, il existe toujours un ‘double standard du vieillissement’ comme l’a théorisé Susan Sontag dans les années 1970. Une femme qui vieillit est dévalorisée, tandis que son homologue masculin gagne en autorité et expertise. Trop souvent, les carrières féminines décrochent à la mi-vie»

Laurence Girard, Directrice générale du Crédit Municipal de Paris : « Travailleuses, aidantes, mères, grands-mères : les femmes de 45 à 65 ans cumulent tous les rôles. Dans l’ombre, elles prennent soin de leurs proches, tout en poursuivant leur vie active sur un marché du travail qui se détourne progressivement d’elles et méconnait les difficultés physiques propres à leur âge. Face à cette somme intenable d’injonctions contradictoires, et alors qu’elles sont déjà pénalisées par un parcours de vie ayant creusé les écarts de revenus et de patrimoine par rapport aux hommes, elles se trouvent contraintes de sacrifier leur carrière, leur future retraite et leur santé. Cette nouvelle note de l’Observatoire de l’émancipation économique des femmes dévoile les chiffres inacceptables des inégalités subies par ces 9 millions de Françaises. Ne les ignorons pas ! »

Sibylle Le Maire, Directrice exécutive de Bayard, fondatrice de ViveS et du Club Landoy 

« L’âge reste en France le premier facteur de discrimination à l’embauche. Pour les femmes seniors c’est la double peine : déjà fragilisées par les interruptions de carrière liées à la maternité, les emplois moins bien rémunérés ou les temps partiels plus fréquents, elles se retrouvent confrontées à partir de 50 ans à un processus d’invisibilisation qui contribue à les appauvrir voire à les sortir de l’emploi. Résultat : au moment de la retraite elles perçoivent des pensions en moyenne 38% inférieures à celles des hommes alors qu’elles vont vivre en moyenne six ans de plus. Les entreprises peuvent jouer un rôle clé dans la lutte contre cette discrimination, c’est pourquoi nous les engageons à rejoindre la Charte d’engagement 50 +  du Club Landoy, déjà signée par plus de 350 employeurs.»

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