Chroniques Le blog de Patric Jean : Prostitution, Libération remet le couvert
Le journal Libération a donc remis le couvert. Un long article donne la parole à Marcel Nuss, poly-handicapé, membre du STRASS et défendant à ce titre le système de prostitution qu’il aimerait voir légaliser. L’article est sans distance aucune, dans la complaisance totale.
On ne peut que s’interroger sur le tournant pris ces dernières années par Libération. Journal historiquement progressiste, celui-ci développe et propage les idées les plus réactionnaires à la mode. Marcela Iacub dont on connaît les positions ahurissantes sur le viol y a son rond de serviette. Le système prostitueur y est vanté par pages entières, donnant la parole ici à Caubère et là à d’autres sans jamais faire un véritable travail d’investigation sur ce qu’est la prostitution aujourd’hui, travaux scientifiques ou terrain à l’appui.
Les journaux n’ont plus les moyens de financer un tel travail me direz-vous? C’est la rengaine habituelle justifiant une paresse et une soumission idéologique qu’il faut mettre en perspective avec le chiffre d’affaires de Médiapart, six fois supérieur à celui de Libération.fr…
Pour des raisons qui appartiennent à sa rédaction (et qu’on imagine), Libé a donc pris le parti de défendre “la liberté de se prostituer”. A court d’argument, les pro-prostitution en viennent souvent à la question du handicap.
C’est donc un homme poly-handicapé que l’on prend à témoin, photo à l’appui. Le problème c’est que l’argument fait long feu. Marcel Nuss est membre du STRASS (lobby qui défend la prostitution) et s’exprime souvent sur le sujet. Il suffit donc de lire sur son blog pour comprendre en quoi la démarche du journaliste est malhonnête.
Marcel Nuss ne cesse d’écrire qu’il n’y a pas une prostitution classique et une prostitution pour personnes handicapées mais que c’est exactement la même chose. Il refuse le distingo. Il milite pour la prostitution en général en tant que “client”. Sa situation de personne handicapée n’est donc qu’un faire valoir hypocrite pour la cause.
D’autre part, comme beaucoup de clients prostitueurs, Marcel Nuss a eu deux compagnes avec qui il a même eu des enfants. On est donc une fois de plus très éloigné du cliché de l’homme seul et désœuvré puisque l’on sait que l’immense majorité des hommes qui ont recours à la prostitution ont une compagne et souvent des maîtresses.
L’homme handicapé (pas la femme, on devine pourquoi) est donc l’alibi idéal. Il symbolise l’être esseulé qui mérite bien aussi sa dose de sexe dont il aurait “besoin”. Mais pourquoi ne pas y ajouter les veufs, célibataires, isolés géographiquement, détenus, malades, trop timides… Des armées d’hommes qui auraient aussi “droit” à ce que des femmes les fassent jouir au dépend de leur propre intégrité psychologique…
Et pour le reste, l’argumentaire classiquement naïf de l’article ferait sourire si il n’était aussi violent. Les femmes prostituées “jouiraient” avec leurs “clients”. Il suffit d’avoir écouté ces personnes pour savoir à quel point les “clients” sont volontairement crédules d’une comédie qui leur est faite. Pour savoir que la stratégie des femmes prostituées n’a qu’un seul but: que cela aille le plus vite possible. Voire que le client croie les pénétrer alors que ce n’est pas le cas. Et que tout cela est évidemment de la violence pure.
Une femme prostituée racontait récemment son horreur quotidienne et son délabrement physique. Elle disait avoir le vagin fatigué. Quand je crie, disait-elle,les clients pensent que je jouis alors que c’est tellement j’ai mal.
En contraction flagrante avec la comédie jouée au “clients”, les femmes prostituées parlent d’eux avec souvent un mépris non dissimulé, voire avec haine. Et on peut les comprendre. Le problème est que les seules femmes prostituées que la plupart des journalistes connaissent sont les deux qui courent les plateaux et rédactions pour raconter à quel point il est formidable de se prostituer.
La voix des dizaines de milliers d’autres femmes prostituées, on ne l’entend jamais. Ni dans Libé, ni ailleurs. Et c’est bien normal, car cela ferait très mal.
Patric Jean