Articles récents \ France \ Politique Sexisme en France : le HCE publie un deuxième état des lieux

Le Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les hommes a publié, le 2 mars, son deuxième rapport annuel sur le sexisme en France, et en particulier dans le monde du travail, des médias et de la politique. Le document est désormais entre les mains de Marlène Schiappa, la Secrétaire d’État chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, qui a assuré que le  gouvernement poursuivra « les efforts engagés »

144 pages et 32 recommandations : voilà ce que contient le rapport édifiant du Haut Conseil à l’Égalité (HCE) sur le sexisme en France, rendu public lundi 2 mars et remis à Marlène Schiappa. « Jamais autant qu’en 2019, le mot sexisme et, plus largement, l’expression violences sexistes et sexuelles n’ont été utilisées», constate le HCE, qui rappelle que « 99 % des femmes disent avoir été victimes d’un acte ou commentaire sexiste en 2019». Pour ce deuxième état des lieux, le HCE s’est penché sur trois domaines de la vie publique en particulier : le sexisme dans le milieu du travail, le sexisme dans les médias et le sexisme dans la vie politique.  

Le monde du travail : un « haut lieu de sexisme »  

Selon le HCE, la « prévalence du sexisme demeure très importante» dans le monde du travail : en 2016, 80 % des femmes considéraient qu’elles étaient régulièrement confrontées à des attitudes ou décisions sexistes dans la sphère de l’entreprise. Plus largement, 60 % des Européennes ont déclaré en 2019 avoir déjà été victimes de violences sexistes ou sexuelles au moins une fois dans leur carrière.  

Le HCE cite également le milieu universitaire et les grandes écoles, un « bastion viriliste où règne une forme d’institutionnalisation du sexisme qui fonctionne comme rite intégrateur» : 63 % des femmes déclarent ainsi avoir déjà été victimes ou témoins de violences sexistes ou sexuelles sur leur campus et 10 % victimes d’agressions sexuelles, selon le rapport.  

Parmi les 32 recommandations émises par le HCE, 12 concernent le milieu professionnel. Le rapport préconise notamment de « favoriser une orientation scolaire et professionnelle sans stéréotypes de sexe», de « rendre obligatoire la prévention et la lutte contre les violences sexistes et sexuelles au travail » et d’« inciter les entreprises à faire connaître la nature et le nombre des sanctions en cas de violences sexistes et sexuelles».  

La télé-réalité pointée du doigt

Autre domaine jugé particulièrement sexiste par le HCE : les médias, qui laissent trop peu de place aux femmes. En 2019, leur part à la télévision n’a été que de 42 %, selon le rapport, et de seulement 29 % en heure de grande écoute.  

La télé-réalité est particulièrement pointée du doigt : considérée comme une « grande pourvoyeuse de sexisme», ces émissions de divertissement sont accusées de mettre en scène des «traits de caractère et assignation à des tâches et rôles stéréotypés», une «sexualisation très présente et guidée par la recherche du «male gaze»(1) » et des «procédés de dénigrement et de « clash » qui  tournent  à plein». Un constat partagé par Marlène  Schiappa : lors de la conférence de presse organisée à cette occasion le 2 mars, la Secrétaire d’État chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes a mis l’accent sur la « rivalité entre les femmes» représentée dans ces programmes. « Alors que nous essayons de défendre un sentiment de sororité […] un certain nombre d’émissions mettent en scène cette rivalité et ce fameux «crêpage de chignon» », a-t-elle déploré.  

« L’urgence est donc de poursuivre les efforts vers la parité à tous les niveaux» estime le  HCE, qui invite notamment le CSA à renforcer sa lutte contre le sexisme dans les médias, et en particulier dans la télé-réalité. 

Le milieu politique : « bastion  du sexisme » 

Malgré des « avancées remarquables de la parité grâce aux contraintes légales», il y a encore du chemin à faire en matière d’égalité parfaite entre les femmes et les hommes dans la sphère politique, selon le HCE. Un milieu où les femmes sont souvent confrontées à des violences sexistes et sexuelles  : « les violences sexistes et sexuelles au sein d’un parti politique sont avant tout un moyen de s’assurer le pouvoir et de fragiliser les parcours politiques des femmes […] Il s’agit de remettre les femmes à leur place et leur place, c’est celle du corps à disposition des hommes », a expliqué Sandrine Rousseau, présidente de l’association Parler, lors de la conférence. «La haute autorité à la transparence pour la vie publique doit être en mesure d’enquêter sur les violences sexuelles et de saisir la justice », a-t-elle ajouté. 

Concernant les postes à responsabilité, là encore, ils sont majoritairement occupés par les hommes : en France, 84 % des maires et 92 % des président.es d’intercommunalité sont des hommes. Le HCE souhaite ainsi des que « règles  paritaires » soient mises en place dans les communes ainsi que dans les exécutifs locaux et intercommunaux. 

Si Marlène Schiappa a assuré partager un grand nombre des constats et recommandations émises par le rapport, elle a par ailleurs fait savoir qu’elle avait observé un « tournant» ces dernières années – et notamment depuis le mouvement #Metoo.  « J’ai le sentiment que nous sommes au bord de quelque chose […] J’ai l’impression qu’il y a un réveil et que la parole des femmes est enfin entendue », a-t-elle expliqué à l’issue de la conférence. Le rapport sera ainsi présenté lors du prochain Conseil des ministres, afin de « poursuivre les efforts engagés ». 

Priscillia Gaudan 50 – 50 magazine 

1 : « Regard masculin » en anglais

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