Brèves CNCDH : Avis sur la prévention et la lutte contre la prostitution, la traite à des fins d’exploitation sexuelle des mineur·es
Alors que le groupe de travail sur la lutte contre la prostitution des mineur·es, mis en place par Adrien Taquet, secrétaire d’État chargé de la protection de l’enfance, doit rendre ses conclusions avant l’été, la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) a adopté un avis dans lequel elle formule 34 recommandations pour prévenir et lutter contre la prostitution et la traite à des fins d’exploitation sexuelle des mineur·es.
« L’exploitation sexuelle est un fléau qui peut toucher tous les enfants, filles ou garçons, sans distinction d’origine ou de classe sociale. Quelles que soient les raisons qui font qu’une personne mineure se retrouve en situation de prostitution, elle doit être considérée comme une victime, vulnérable, isolée et abimée » affirme Jean-Marie Burguburu. « Les pouvoirs publics ont l’obligation morale de la protéger, de l’accompagner et de lui permettre de se re-construire un avenir. »
Renverser la perspective
En qualité de rapporteur national indépendant sur la lutte contre la traite des êtres humains*, la CNCDH appelle les pouvoirs publics à renverser la perspective et à faire de la protection des victimes la porte d’entrée et le cœur d’une politique publique de lutte contre la prostitution et l’exploitation sexuelle des mineur·es
La CNCDH insiste en outre sur la nécessité que la lutte contre le fléau de la prostitution et de l’exploitation sexuelle des mineur·es soit pilotée au niveau national, sous la coordination de la MIPROF, et que les moyens octroyés aux acteurs de cette politique, dont l’Aide sociale à l’enfance, soient renforcés.
Clarifier les textes
La CNCDH recommande en tout premier lieu d’utiliser des définitions claires de la prostitution et de la traite des êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle des mineur·es. En effet, clarifier les textes est un préalable indispensable tant pour identifier les victimes que pour utiliser des qualifications pénales les plus protectrices.
Construire un lien de confiance
Pour identifier un·e mineur·e victime de prostitution, puis élaborer une protection, tout en assurant un accompagnement adapté et global, il est primordial de construire un lien de confiance avec ce dernier. Pour ce faire, la CNCDH recommande notamment de systématiser les démarches « aller vers », dans la rue et sur Internet, en associant des professionnels de l’Aide sociale à l’enfance (ASE), des travailleurs et travailleuses et des associations de terrain, de multiplier les cyberpatrouilles, ou encore de développer les partenariats entre l’ASE, les associations et le parquet de mineur·es dans le cadre de signalement.
Garantir une protection inconditionnelle des enfants victimes
Tout·e mineur·e victime présumée d’exploitation sexuelle doit bénéficier d’une mise à l’abri immédiate et inconditionnelle et de la désignation le plus tôt possible d’un administrateur ad hoc, qui joue un rôle clef pour garantir l’effectivité des droits de la victime et lui permettre de se stabiliser. En outre, un impératif s’impose, celui de densifier le réseau de lieux d’accueil diversifiés et d’interdire tout hébergement dans des hôtels.
La CNCDH insiste sur la nécessité que ces jeunes ne soient pas livrés à eux-mêmes dès qu’ils atteignent la majorité, et qu’ils participent activement à la construction de leur projet de vie, condition indispensable à leur pleine adhésion à celui-ci.
Prévenir l’exploitation sexuelle des mineur·es
Convaincue que l’information et l’éducation à la sexualité sont des vecteurs clefs pour prévenir l’exploitation sexuelle des mineur·es et identifier les victimes potentielles, la CNCDH recommande de mettre en place une approche globale de la sexualité, ainsi que de mener des actions de sensibilisation aux violences, en particulier sexuelles, y compris dans les foyers de l’enfance.
*La CNCDH est rapporteur national indépendant sur la traite des êtres humains depuis 2014. Dans le cadre de ce mandat, la Commission évalue l’action des pouvoirs publics pour lutter contre ce fléau en France et formule des recommandations dans différents avis. Actuellement, elle coopère étroitement avec la MIPROF, dans le cadre de la création d’un mécanisme national de référence pour l’identification et l’accompagnement des victimes de traite des êtres humains en France, à la suite d’un avis adopté en avril 2020